Exquis Cadavre Exquis, la troisième récap !

Exquis Cadavre Exquis, la troisième récap !

Arrêt sur image, venez découvrir l’état de notre exquis cadavre exquis…

Déjà 42 épisodes…

que vous suivez avec attention

et

peut-être que bientôt ce sera à vous de tenir le scalpel !

Bonne dégustation…

L’exquis cadavre Exquis de Collectif Polar

Pour ceux qui n’auraient pas suivi

Les 16 premiers chapitres sont Ici

Les 12 chapitres suivant  sont là

Pour les autres voire pour tout la monde voici les épisodes 29 à 41



Episode 29 by Gwendoline Weis

Bons baisers d’HP

Ses lèvres esquissèrent un léger mouvement vers la droite, quelque chose comme un sourire, ou plutôt un rictus. Oui, un rictus. D’ailleurs, c’est un peu la contraction de sa vie.  Une grimace, un pauvre rictus, toujours forcé, rarement sincère : sardonique.
C’est moche ce mot « sardonique », dur et agressif, comme lui.

Comme lui, Bruno Lalande, fils de bonne famille.

Né à Bordeaux, le petit Bruno a grandi à Pessac au sein du domaine viticole familial. Fils d’Edmond Lalande et de Jeanne de Frémont, des notables de l’or rouge, il n’a jamais connu le besoin. Une enfance des plus douces déjà ornée par des sommes à cinq « 0 » qui trônaient fièrement sur un compte bancaire. Un demi-frère Pierre, fruit d’une première union maternelle, agrémente la famille.

Mais si l’argent offre quantité de choses, il n’achète pas le besoin d’appartenance régissant la troisième strate de Maslow. Ce sentiment d’appartenance à un groupe de pairs, d’être reconnu en tant que tel, ce même sentiment qui l’a quitté le soir où il annonça son désir ardent de vivre auprès de Laure.

Laure son amour, ses joies, mais aussi ses pertes. Plus que le cordon, c’est toute son histoire qui s’est vue coupée par ceux qu’il nomme désormais ses géniteurs. Fort heureusement, ses rapports avec son frère ont toujours été relativement cordiaux, d’autant plus ces dernières années. Ambitieux, avides de pouvoir, Pierre et Bruno se ressemblent à s’y méprendre.

Il sourit de sa besogne, conscient qu’il ne peut désormais plus reculer, c’est bien trop tard. Il a franchi la ligne manichéenne, le jour où il a envoyé Carole rencontrer la faucheuse. Il le savait pourtant, il le savait. Laure occupait ses pensées en permanence, il pouvait l’observer toute une nuit dans les bras de Morphée, il pouvait la suivre pour s’assurer qu’elle se rende bien à son cours de tai-chi le mardi soir, il avait même équipé son téléphone d’un traceur commandé sur le Darknet. Il pouvait en crever tellement il en était dingue.

Alors, il a fait interner Laure en Hôpital Psychiatrique. Bien sûr qu’il y avait la « TS », qui peut prédire la réaction d’une mère qui vient de perdre son enfant ?! La déchéance, l’horreur, la colère, puis arrive le besoin de vérité…Puis, il eut une idée.

Avoir le bras long, ça sert. Et Bruno Lalande l’avait bien compris. Sa Laure serait à l’abri des regards, à l’abri de la vérité et surtout, elle serait bientôt rien qu’à lui.

Bruno avait repéré les frères Mazoj, Anton et Pavel, deux infirmiers d’origine tchèque qui n’ont su résister devant l’appât du gain. 500 euros mensuel, en cash, pour chacun.

Le prix d’une sédation forcée, juste ce qu’il faut pour ne pas être détectable dans le sang. Juste ce qu’il faut pour shooter sa bien-aimée et annihiler tout sursaut de résilience.

Son rictus s’étend pour se muer en sourire malin. Il sort précautionneusement son deuxième téléphone, à clapet, passé de mode, et envoie un seul SMS à un numéro crypté : « Mission, groupe : Wampas, titre : Rimini, en canon. Enlève un « i » à la ville. Remplace voyelle. 30000. »

Sur l’air de « Rimini » des Wampas, Bruno Lalande sifflote, tout en déposant un baiser sur le front de sa Laure.

Episode 30 by Guy Rechenmann

Prise d’appel

 Sirène hurlante et gyrophare débridé, Sebastián fonce vers Lariboisière. La voiture banalisée du fonctionnaire de police ne laisse pas de doute quant à sa détermination d’homme pressé. Un regard haineux ajouté à un eczéma en pleine floraison lui confère un viatique pour l’enfer et toute rébellion d’un quidam quelconque serait peine perdue. Rien ne peut l’arrêter. Par miracle, personne n’est blessé durant la course folle. Seules quelques tôles froissées sont à déplorer lors de son arrivée en fanfare crissante sur le parking de l’hôpital, mais on verra plus tard. Elle s’est réveillée ! C’était le motif du coup de fil qu’il a reçu au bureau. Valérie a ouvert les yeux et a demandé où elle se trouvait.

 « Elle semble perdue, très pâle, mais elle est en vie », lui a précisé le chirurgien.

 Ça, c’est la bonne nouvelle. La mauvaise : elle ne se souvient de rien ! Ni de son nom, ni de son métier, ni où elle habite, enfin, rien de rien… Sebastián a eu le temps de réfléchir durant son gymkhana et il a compris. Enfin il pense avoir compris pourquoi elle n’était pas ad patres. Normalement elle aurait dû mourir d’une balle en plein cœur. D’autant qu’elle n’a pas le cœur à droite.  Cela existe, mais non ! Le tireur, un professionnel, sûrement le meurtrier des deux journalistes, devait l’attendre à la sortie de l’HP après sa visite à Laure Longchamps. Pas trop proche pour ne pas être repéré mais muni d’une lunette et d’un silencieux, il ne pouvait ni être débusqué ni rater sa cible. La configuration des lieux l’y autorisait. Or la balle est bizarrement entrée sous le cœur de sa collègue, ne touchant heureusement aucun organe vital. Un vrai miracle.

« La tête a heurté le rebord d’un massif lors de la chute », a précisé le praticien. « Le traumatisme peut expliquer sa perte de mémoire ». Et il a conclu de façon évasive : « Il faut attendre… »

Ce fameux rebord est, pour elle, à la fois une pierre de salut et peut-être un ciment destructeur, qui sait ? Sebastián se refait le film en voyant la scène de crime balisée. Le tueur attend… Valérie, la tête dans ses pensées, marche d’un pas alerte vers le parking. Elle n’a aucune raison d’être sur le qui-vive. Sa démarche a toujours été rapide, ce qui ne manquait pas d’agacer ses collègues. Mais elle ne suit pas le cheminement traditionnel, elle coupe prestement le fromage en direction de sa voiture, déstabilisant certainement le tireur. Elle va pour traverser la languette étroite composée de fleurs vivaces et, juste au moment où elle prend un vif appel pour franchir la margelle, le coup de feu part et rate le cœur. Il ne peut en être autrement, Sebastián en est certain. Maintenant un autre combat commence. Décidément, cette affaire n’en finira jamais…

Episode 31 by Carlo Caldo

 Confidences devant l’étang

 En cette fin d’après-midi, le parc qui borde le commissariat est traversé par tous ceux qui, ayant terminé de travailler, rentrent chez eux. Il offre cependant assez de diversité pour qu’on puisse se mettre à l’abri des regards. Comme ce banc, sous les bosquets, près d’un étang, où Fantômette a donné rendez-vous à Gaston Pichon, le jeune aspirant-inspecteur qu’elle est parvenue à embobiner. Un contact de rêve, vu qu’il est en stage à l’archivage au commissariat. Ce qui lui permet d’avoir accès aux principaux éléments des enquêtes passées et en cours, sans pour autant y participer.

Pour le coup, Fantômette s’est transformée en un de ses avatars favoris : Amanda, la jeune étudiante blonde, venue de l’Amérique profonde. Sexy, enthousiaste et naïve à souhait. Pourvue d’une incommensurable fascination pour la « poêzie fouançaise », elle est le personnage idéal pour attirer un bleu comme Gaston.

Pourtant, ce jour-là, elle a dû insister pour pouvoir lui parler.

 – D’accord, mais pas au téléphone ! a-t-il chuchoté nerveusement.

Elle l’a interprété comme la conséquence logique de son geste. Un flic abattu est de nature à faire monter la fièvre dans un commissariat.

– Rendez-vous dans dix minutes devant l’étang !

L’injonction était claire. Quelques semaines plus tôt, c’est là même qu’elle l’avait abordé, après l’avoir suivi depuis le commissariat. Il lui avait suffi de jouer l’ingénue perdue dans la grande ville. Les confidences s’étaient alors déversées, intarissables, sur sa vie, ses espoirs et ses rêves d’amour. À quoi elle avait répondu en jouant la carte de l’impressionnée. Elle l’avait même comparé à Clint Eastwood !

En cet instant, les yeux d’Amanda s’écarquillent soudain derrière ses lunettes rondes et sa bouche s’immobilise, béante, au-dessus du cornet de glace qu’elle s’apprêtait à croquer.

– Oh my God !… I can’t believe it ! finit-elle par dire.

De fait, Amanda a vraiment du mal à croire à ce que Gaston vient de lui apprendre. Quoi !? Non seulement cette garce n’est pas morte, mais elle vient de sortir – et, semble-t-il – indemne de son coma ! C’est pire que ce qu’elle craignait. Comment expliquera-t-elle cela à Lalande qu’elle doit voir le soir même ?  Adieu les 30.000 euros promis, adieu la rallonge prévue pour le troisième meurtre ! Quant à sa chère devise selon laquelle mieux valait ne rien faire plutôt que de mal faire, autant l’oublier pour un temps ! La honte !

C’est le problème numéro un à régler. Retourner et finir le travail. Et le plus tôt sera le mieux ! Mais avant cela, autant profiter au maximum de sa rencontre avec Gaston. D’abord, confirmer la valeur de ses confidences.

– What a story ! Thank you so much, Gaston ! Chaque fois que je te vois, tu me racontes quelque chose de nouveau et de si surprising ! C’est comme une série policière sur Netflix.

– C’est même mieux, car tout est vrai. Des indices n’arrêtent pas d’apparaître, des nouveaux personnages surgissent continuellement, des pistes inattendues s’ouvrent.

Ensuite créer le doute.

– Mais l’histoire, reprend-elle avec son accent américain, devient aussi de plus en plus complicated, je m’y perds… Cette attaque sur ta colleague après les trois horribles meurtres de journalistes…

– Gisela Löwenbrau en Allemagne, Camille Longchamps et Romain Richard ici…

Romain Richard ! Comme elle a été contente quand elle a appris par Gaston qu’il était l’homme de la poubelle ! Camille lui a suffisamment parlé de lui pour qu’elle comprenne que ce pisse-copie avait des dents d’ambitieux à rayer le parquet et qu’il n’aurait eu aucun scrupule à lui voler ses découvertes.

– Comment vous faites pour vous y retrouver ? demande-t-elle.

– C’est en effet un véritable défi mais, crois-moi, nous mettrons tôt ou tard la main sur Fantômette. La raison comme la justice finissent toujours par triompher.

Amanda n’a pu réprimer un sourire. Sans doute Gaston pense-t-il vraiment ce qu’il vient de dire.

Le fruit étant mûr, le moment est venu de lancer de fausses pistes.

– Moi, mon instinct me dit que Fantômette n’est pas une killer. Je la vois très romantic, animée par des vraies valeurs et des grands idéaux, un peu comme toi.

 – Tu penses ? bredouille-t-il.

– Oh, yes! Par contre, il y a trop de morts parmi les journalists. C’est pas normal. J’ai le feeling que c’est un règlement de compte entre eux.

– Tu chercherais du côté de Max alors ?

– Certainly! Ou de Richard ! Et si c’était lui l’assassin de Camille et Gisela?

– Intéressant !… Merci, ça peut m’être très utile !

– Ah ! Pourquoi ?

Gaston se lève alors soudainement, le sourire fier.

– Tu pars déjà ?

– Il le faut… Je ne devrais pas te dire, mais j’ai un nouveau travail. J’ai été désigné pour remplacer l’inspectrice Rémini. Je venais de l’apprendre quand tu m’as téléphoné… C’est temporaire bien sûr, mais qui sait quand elle redeviendra opérationnelle !

Episode 32 by Leeloo Dallas-multipass

Chantez, dansez, les têtes vont valser

Après avoir appris par Gaston que l’Inspectrice Rémini a survécu, Fantômette s’égare dans ses pensées. C’est son premier échec, jamais elle ne rate sa cible. C’était un contrat bien différent des autres. Vivement qu’elle passe à autre chose, en espérant que cette imbécile de Lalande n’entache pas sa réputation. Au pire, elle lui prend l’argent et lui fout une balle entre les deux yeux !

Le téléphone sonne. Elle sursaute et prend l’appel, en pensant à Lalande. Quand on parle du loup, on en voit la queue.

– « Monsieur Lalande !… Oui, j’ai appris ! Elle n’est pas morte… Elle a eu de la chance, cette fois-ci, c’est tout ! Je vais me rendre à son chevet pour soulager ses douleurs… Non, monsieur Lalande, il n’y aura pas de prochaine fois, je vous assure. Elle sera morte avant demain soir… Je vais en finir avec elle et notre contrat sera terminé. Ne vous inquiétez pas, il n’y aura pas de suite à cette enquête ! Son remplaçant est aussi intelligent qu’un poisson rouge dans son bocal ! Et pour mes 30 000 euros ?… Pour le supplément, on oublie ?… OK ! Au revoir, oui, oui, à bientôt. Je vous tiens informé. »

Elle raccroche sans le laisser parler. Quelle grosse merde, ce Lalande !

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Blanchard est à ses côtés quand Lalande appelle Fantômette. Il écoute attentivement la conversation. Il est très énervé et très mécontent que son demi-frère ait choisi cette femme pour faire le boulot.

– « Franchement, tu crois vraiment qu’une nana, cette pétasse soi-disant tueur à gages, allait faire le boulot proprement, sans faire de vague ? Et en plus, tu la payes 30 000 pour ce travail ! Ecoute, je m’inquiète ! Elle ne nous a toujours pas donné l’enveloppe, elle cherche à te faire chanter… Je vais lui envoyer mon homme de main, elle n’aura pas l’argent. Rien à faire ! Tout ce qu’elle aura c’est une balle entre les deux yeux ! Elle veut te faire chanter ? Ben, moi je vais la faire danser ! Et l’autre, l’inspectrice de mes deux, elle ressortira de l’hosto entre quatre planches ! »

 

Episode 33 By David Smadja

La connerie, c’est contagieux !

Dépité par l’état de sa chère Valérie, Sebastián se dit qu’il était grand temps pour lui de rendre visite à Laure Longchamps, dans son lieu de résidence forcée, et d’éclaircir le rôle de la mère de Camille dans tout cet imbroglio. Il grimpa dans sa voiture, mit en marche le gyrophare et s’engouffra à toute allure dans les affres de la circulation.

Arrivé à destination quelques dizaines de minutes plus tard, il se dirigea vers la réceptionniste, lui colla sa carte de police sous le nez et demanda à voir madame Longchamps sur le champ.

– Vous la verrez plutôt dans sa chambre, se moqua la jeune réceptionniste avec malice.

– Où vous voulez mais de suite, lui rétorqua le policier d’un ton sec.

– J’appelle l’infirmier en charge de la patiente. Veuillez donc patienter à votre tour dans la salle d’attente, lui dit-elle, mettant fin à la conversation d’un clin d’œil entendu.

De longues minutes plus tard, un homme massif, à la mine renfrogné, s’approcha de lui en faisant rouler ses muscles.

– Madame Longchamps a besoin de repos, elle n’est absolument pas en état de vous voir.

– J’ai une carte « chance » qui dit que je peux quand même la voir, répondit Sebastian en brandissant de nouveau sa carte de police.

L’homme blêmit, mal à l’aise.

– Vous êtes de la police ? On ne me l’avait pas précisé.

– Tout à fait et je veux la voir subito ! Monsieur… ?

– Je m’appelle Anton Mazoj.

– Vous seriez donc maso de refuser, Anton. Et si vous continuez à faire le malin, j’en connais un qui va finir au poste. Vous savez, la connerie, c’est contagieux, et vous ne voudrez pas me voir contaminé !

Sebastian posa sa grosse patte sur l’épaule de l’infirmier dont le vernis de suffisance commençait à craqueler de toutes parts. Ressentant le malaise, il accentua la pression et mit en marche le gaillard. Ensemble, ils gravirent les marches et arrivèrent à l’étage supérieur, celui où l’on confinait les cas les plus désespérés, dixit l’infirmier devenu prolixe soudainement.

Arrivé devant la porte de la chambre 13, l’infirmier s’éclipsa en bredouillant une excuse incompréhensible. Sebastian le regarda s’éloigner, méfiant. A juste titre, car Anton allait chercher Pavel à la rescousse. Pas si sûr que l’inspecteur sorte aussi facilement de l’hôpital qu’il en était entré. Car Pavel n’était pas du genre à plaisanter et lui ne serait nullement impressionné par le flic. Il en avait buté des dizaines en Tchéquie. Et autant dire que cela n’agitait pas sa conscience.

Sebastián toqua à la porte. Une voix étonnamment claire lui parvint :

– Bonjour, inspecteur. Entrez, je vous attendais. Je crois que l’on a beaucoup de choses à se dire…

Episode 34 by Danièle Ortega-Chevalier

Allo papa ?

 A quelques kilomètres de là, une ado prenait son smartphone…

– Allo papa ?

Depuis que sa femme Fanny l’a quitté il y a trois ans en abandonnant accessoirement leur petite fille de 8 ans, c’est la maman de Max qui le dépanne en assurant la garde de l’ado, souvent à temps plein quand il est en déplacement ou sur une investigation particulièrement délicate. De fait, ils se voient rarement mais Max essaye de préserver le repas dominical, véritable briefing de la famille Lindberg. Le rituel des coups de téléphone quotidiens a pris du plomb dans l’aile depuis la mort de Camille.

– Oui, Louise, comment va ? Comment ça se passe avec Mamie Aline ?

–  Je crois bien que j’ai encore pris quelques kilos de gaufres et de crêpes… Comment va Camille, papa ?

Max a essayé de filtrer les informations concernant son amie car il sait comme Louise y est attachée depuis le départ de Fanny. Inévitablement, elle apprendra la mort de la journaliste. Mais le plus tard sera le mieux. C’est un miracle qu’elle ne l’ait pas encore découvert via les réseaux sociaux.

– Elle va mieux ma puce, elle rentre bientôt chez elle.

– Tu l’embrasses pour moi ?

– Promis, on ira la voir très bientôt !

– Et au fait, je ne t’ai pas rendu la clef USB de Camille…

– Quelle clef USB ?

– Celle qu’elle m’avait demandé de planquer avant… tu sais bien, avant…

– Mais qu’est-ce que c’est que cette histoire de clef ?

– La dernière fois que Camille est venue dire bonjour à MaAline, elle m’a demandé de lui garder une clef et de rien dire à personne. C’était une semaine avant de se faire attaquer.

La voix de l’adolescente se brise. Max en a le cœur serré. Mais il faut qu’il sache. Il poursuit :

– Tu l’as toujours ?

– Oui, bien planquée mais je ne veux plus la garder, j’ai peur !

– On en parle très vite, ma chérie !

– Tu rentres quand d’Allemagne ?

– Dans quelques jours, je ne sais pas au juste.

– Je t’aime, papa.

– Moi aussi je t’aime. Je t’embrasse, ma puce ! Dis à MaAline que je vais bien.

– Pap ….

Il raccroche avant que Louise ait pu lui dire que l’appartement face à celui de Mamie a une nouvelle locataire, blonde, aimable et jolie comme un cœur, au prénom enchanteur… et qu’elle aimerait bien que son père fasse sa connaissance… Oui, il faudra qu’elle lui présente Amanda…

Episode 35 by Céline Brisard-Lison

Attention, danger

 En raccrochant son smartphone, Max Lindberg se renfrogna un peu plus.

– Un problème ? lança Xavier Costes, le regard fixé sur la route battue par une pluie aussi brutale que torrentielle. Sans même voir son compagnon de route, il pouvait sentir que, loin de l’apaiser, l’appel que Max venait de passer à sa fille le plongeait dans une tension un peu plus profonde encore. Il ne reçut aucune réponse. Habitué aux sautes d’humeur de ses clients, le privé choisit de se concentrer pleinement sur sa conduite. « Ce serait quand même sacrément con de finir dans le fossé en se traînant à 80 ! », pensa-t-il.

De fait, plongé dans ses pensées, le journaliste n’avait même pas entendu Costes. S’il lui avait proposé de venir en Allemagne avec lui, c’était à contrecœur. Habituellement, il préférait – et de loin – enquêter seul. Non pas qu’il se sente supérieur aux autres, mais simplement parce qu’il n’avait jamais trouvé quelqu’un avec qui il se sente en osmose, en matière de réflexion. Personne, à part peut-être Camille… « Ah, Camille, toi, tu m’en as caché des choses… Si j’avais su dans quel guêpier tu t’étais fourrée, jamais je ne t’aurais laissée seule à cette soirée. Tu vois où ça t’a amenée ! », songea-t-il avec une pointe d’amertume et de remords mêlés.

Depuis sa discussion avec Friedrich, Max était persuadé que la piste allemande était la bonne. Grâce à un copain de la police, il avait aussi appris l’identité de l’homme qui, juste avant lui, avait fouillé l’appart de Camille. Et fini une balle dans la tête dans une poubelle. Romain, Romain Richard, bon sang ! Encore un journaliste ! Et lui était le dernier à avoir enquêté avec Camille. Max ne comptait pas rejoindre la liste des cadavres qui s’amoncelaient depuis la funeste soirée du Muséum : il avait préféré appeler Costes en renfort. Le détective privé avait le privilège de détenir un port d’arme. Et il était de plus en plus évident que ce type d’argument pouvait leur être utile.

– Lindberg ? Oh, Lindberg ! Tu m’écoutes, bon sang ? Il faut que je te parle d’un truc que la p’tite Longchamps m’a envoyé…

Max sursauta au nom de Camille.

– Quoi ? De quoi tu parles ?

– Elle avait programmé l’envoi d’un mail, je l’ai reçu hier au petit matin…

– Ah ouais ? Et t’attendais sa résurrection pour m’en parler ?

Max était de plus en plus furieux. Non seulement Camille avait fait confiance à ce Costes pour enquêter, mais en plus, elle lui faisait des confidences post mortem. Et lui alors ? Il n’était donc rien dans la vie de sa protégée ?

– Le hic, c’est que je n’ai rien compris. Le mail est rempli de noms, de dates, de termes en allemand. Comme si c’était ses notes et qu’elle s’adressait à quelqu’un qui pouvait les comprendre. Elle a souligné une phrase : « Venez chercher l’enveloppe coquelicot ». Tu y comprends quelque chose, toi ?

– Hummm… Rien d’autre ?

– Oui, une pièce jointe. Enfin, une pièce jointe cramée. Impossible de l’ouvrir. J’ai quand même envoyé le fichier à un pote informaticien, au cas où…

– Putain, mais c’est pas vrai ! J’suis vraiment trop con !

Max venait de comprendre. Loin de l’ignorer, Camille avait au contraire multiplié la dissémination de ses informations. Lui, avec cette fameuse clé USB confiée à Louise, sa fille. Costes avec le mail. Et probablement Romain Richard. Richard, déjà au parfum de l’enquête de Camille, qui avait aussitôt rappliqué pour récupérer l’enveloppe. Pile au moment où une tueuse rodait chez elle… Si ces infos avaient conduit un gaillard comme Richard ad patres, la vie de celles et de ceux qui les détenaient ne tenait vraiment qu’à un fil. Louise !! Pris d’un pressentiment glaçant, Max reprit son téléphone en main.

– Sebastián ? Il faut que je te parle !

Episode 36 by Patrice Guirao

Á mains nues

L’immeuble est cossu. Quatre étages. Rue passante. Une seule entrée. La cible a emménagé au deuxième. Il sort la photo que Louys lui avait remise en même temps que les cinq mille euros. Rien d’autre. Excepté le numéro de téléphone derrière la photo. Jolie fille. Jeune. Un rien arrogante. Pleine de vie.

Cinq mille euros.

La vie n’a pas de prix.

Ça dépend d’où on vit.

Le vieux trainait son infirmité depuis l’enfance. Mauvaise polio. L’avantage de son handicap, dans sa profession, c’est qu’il inspirait plus souvent la compassion que la méfiance. Ce qui lui laissait presque toujours un temps d’avance.  Une compensation au fait qu’il ne pouvait se permettre de se faire courser dans les rues. Avec sa patte folle c’eut été folie.

Il lui avait fallu élaborer des techniques personnelles. Pas d’arme à feu, pas d’arme blanche. Exit les risques lors d’un éventuel contrôle. Quarante ans de métier et pas un faux pas. Il sourit à cette étrange formule le concernant.

Son truc c’était le fait main. La nature l’avait doté d’une force hors du commun concentrée dans ses poings. Ses meilleurs outils.

A dix-sept ans, lors des fêtes de Pampelune, il avait tué, d’un uppercut, un taureau qui fonçait sur lui. Il en avait été stupéfié lui-même. Les autres jeunes avaient couru, lui s’était défendu. Depuis ce jour il avait scrupuleusement évité toutes les situations dans lesquelles sa survie pouvait dépendre de ses jambes.

Il lui avait fallu quatre jours pour remonter jusqu’à cette adresse grâce au numéro de téléphone. Il avait mis à contribution quelques connaissances toujours prêtes à lui renvoyer l’ascenseur. Une vie de menus services, ça paie toujours.

Louys avait distribué les trois enveloppes au hasard. Frantz avait ouvert la sienne. Il en avait sorti une liasse de dix mille et l’avait secouée devant eux un sourire aux lèvres.

– Jackpot !

Il s’était gardé de montrer la photo de sa cible. Un minimum !

Sam avait pris la sienne et l’avait glissée dans sa poche sans aucun commentaire.

Louys se chargeait de trouver les contrats et eux les exécutaient.

Pas de liens directs avec les commanditaires. Louys achetait les contrats sur un site du Darknet. Une sorte de vente aux enchères. Une bourse de la mort. Les enveloppes lui étaient alors expédiées en poste restante. Il y prélevait ce que lui avait coûté le contrat et la moitié de la somme restante. Puis il remettait les contrats à ses trois tueurs à gage. Une petite entreprise qui fonctionnait bien. Mais parfois un pari financier risqué.

Le vieux ne fumait pas, il prisait.  Il insuffla quelques grammes de poudre de tabac habilement posés sur le dos de sa main. Il secoua légèrement la tête et se frotta le nez.

Il était temps de monter.

Pas d’ascenseur. Des escaliers larges. Recouverts d’un épais tapis orné de lys.

L’appartement était celui de droite. Tant mieux. La porte s’ouvrait sur la gauche. Un avantage. S’il devait frapper, les quelques dixièmes de secondes gagnés pour lancer son poing droit pouvaient s’avérer importants.

Pas de judas. Ça se présentait plutôt bien.

Il sonna et attendit.

La porte s’ouvrit.

C’était la fille de la photo. Mais blonde.

Le poing partit avec une violence et une rapidité impossible à imaginer venant d’un vieil infirme. La jeune femme, dès qu’elle l’avait aperçu, avait immédiatement senti le danger. Elle avait essayé de faire un pas en arrière tout en tentant de refermer la porte mais trop tard. La poussée qu’elle donna réussit tout de même à dévier légèrement la trajectoire du coup. Au lieu de percuter sa gorge, il la toucha juste en dessous, à gauche, près du cœur. Elle entendit ses côtes se briser et ressentit une douleur violente qui lui coupa le souffle et la paralysa. L’homme l’écarta de son chemin et ferma la porte derrière lui. Il n’avait plus qu’à l’achever tranquillement. A mains nues.

– Amanda ? C’est qui ? Qu’est ce qui se passe ?

Une voix de jeune fille. Ça venait de l’autre bout du couloir. D’une chambre. Ou de la salle à manger.

Le vieux se figea. Il y avait quelqu’un d’autre dans l’appartement. Ce n’était pas prévu. Elle vivait seule. En une semaine de planque, il n’avait jamais vu personne lui rendre visite. Impossible de terminer le boulot. Pas question qu’il exécute quelqu’un d’autre que sa cible. Cette fois il allait devoir compter sur ses jambes et, pour la première fois depuis toute sa carrière, il fut saisi d’une mauvaise angoisse.

Il était temps qu’il raccroche.

Ce n’était plus un métier pour lui.

Il sortit de l’appartement, referma la porte sans la claquer et se précipita dans les étages supérieurs. Ces vieux immeubles avaient tous un accès sur les toits. Il y resterait le temps qu’il faudrait. En priant pour que personne n’ait l’idée d’y monter.

Episode 37 par Michel Roberge

Fallait y penser

Fantômette savait qu’en se rapprochant de la fille de Max, sous l’apparence d’une Amanda plus blonde que blonde, elle pourrait l’utiliser pour lui tendre un piège. En apprenant qu’un appartement était libre dans l’immeuble où résidait Louise et la mère de Max, elle s’était empressée d’y emménager. Comme il était entièrement meublé, elle avait sauté sur l’occasion. Pour elle, qui déménageait aussi aisément qu’un serpent change de peau, le contexte était idéal.

Depuis quelques jours, elle surveillait les allées et venues de ses deux voisines, attendant le moment opportun pour agir. Puis, un vendredi matin, Louise et Amanda se croisèrent, comme par hasard, sur le palier. Mamie Aline était partie faire des courses. Amanda en profita pour inviter la jeune fille à partager avec elle une chocolatine pour faire de plus amples connaissances.

Pendant que Louise croquait à belles dents dans la viennoiserie, Amanda raconta à Louise qu’elle écrivait des romans pour les ados comme elle :

– Tu pourrais être une de mes sources d’inspiration, lui proposa-t-elle.

Emballée par le projet, Louise accepta, convaincue de devenir l’héroïne d’un prochain best-seller.

– Mon éditeur insiste pour que je lui livre un texte au plus tard à la fin du mois, mentit Amanda. Il faudrait se mettre à la tâche immédiatement.

Mais on avait sonné…

En découvrant Amanda gisant sur la moquette, et apercevant le profil d’un homme boitillant refermer la porte derrière lui, Louise hurla :

– HÉ, VOUS LÀ !

Voyant qu’Amanda peinait à respirer, elle sortit de la poche de son pantalon son iPhone pour appeler les urgences.

– Non, non Louise. Ça va aller. Ce n’est rien, balbutia la jeune femme dont la perruque avait glissé sous le choc, laissant paraître en partie une chevelure courte et noire.

– Amanda, qu’est-ce qui t’arrive? demanda l’ado prise de panique.

Pendant que la fausse blonde tentait une explication des plus rocambolesques, tout se mit à tourner à vitesse grand V dans le cerveau de Louise : la clé USB. Cet homme était venu pour la lui voler. Comme l’entrée des deux appartements était similaire, il avait été confondu et avait sonné à la mauvaise porte. Et Max qui ne serait pas de retour avant plusieurs jours… Elle devait à tout prix trouver une nouvelle cachette pour le support informatique que lui avait remis Camille.

– Je reviens tout de suite, Amanda, annonça Louise, fébrile, en jetant un œil incrédule sur sa voisine qui réajustait tant bien que mal sa perruque dorée.

Louise ouvrit la porte d’entrée, jeta un œil sur le palier. L’agresseur s’était volatilisé. Elle courut chez elle, se précipita dans sa chambre, se glissa sous le lit pour récupérer le petit boîtier métallique qui y était scotché. Si Mamie Aline possédait un ordinateur, elle pourrait satisfaire sa curiosité et voir ce que pouvait bien renfermer cette clé pour qu’un homme s’en prenne à une inoffensive femme comme sa voisine. Elle ouvrit le contenant : l’objet devait avoir une grande valeur. Elle eut un flash : Amanda écrivait des romans, donc elle avait un ordi…

Episode 38 by Marc Schaub

Encaisser deux tchèques

 La porte de la chambre 13 s’ouvre brutalement, laissant le passage à Anton et Pavel qui bondissent sur Sebastián. Le policier n’a pas le temps de sortir son arme, et les deux molosses n’ont aucun mal à le maîtriser. Un coup de taser finit le travail. Anton administre à Laure Longchamps une piqûre contenant une sombre substance censée lui faire oublier la scène à laquelle elle vient d’assister…Si la dose n’est pas trop forte et qu’elle se réveille, elle n’aura que pour seul souvenir l’impression d’avoir passé sa journée à flotter parmi les nuages.

30 minutes plus tard, Sebastián reprend doucement et douloureusement conscience. Il est enfermé dans le coffre d’une voiture, ligoté comme un saucisson et bâillonné. Pas de mouvement, aucun bruit, aucune lumière ne passe à travers les joints du coffre. Il est clair que la voiture est à l’arrêt. Depuis combien de temps était-il dans les vapes ? Où l’ont-ils emmené ? S’il était encore sur le parking de l’hôpital, il devrait entendre le bruit de la circulation de l’axe routier qui passe juste devant l’établissement. Bonne nouvelle, il est en vie, probablement parce que Heckel et Jeckel ne savent pas encore quoi faire de lui. Il est donc en sursis le temps que les ordres arrivent. Mais pourquoi serait-il épargné alors qu’ils n’ont à aucun moment hésité à liquider Valérie, ou tout du moins, essayé de la liquider ? Il a beau tenter de se libérer de ses liens, rien n’y fait. Si vous organisez une soirée bondage, pensez à inviter des tchèques, ils maîtrisent le sujet quand il s’agit d’attacher quelqu’un avec une corde. Votre soirée sera une réussite.

A 200 mètres de la grange dans laquelle la vieille Mercedes 560 SEC est garée avec son colis, les deux tchèques attendent, avec impatience, des nouvelles et les ordres de leur patron. Si Anton n’avait pas retenu Pavel, le sauciflard aurait déjà été coupé en rondelles et servirait d’apéro aux poissons-chats du cours d’eau qui coule juste à côté.

– Je t’ai déjà raconté comment j’ai éventré deux vermines de flics à Prague avec une petite cuillère, alors que je n’avais même pas 18 ans ?

– Oh oui, Pavel, au moins 15 fois, mais en général, tu es bourré quand tu me le racontes. Donc tu ne dois pas t’en souvenir. Et à chaque fois, je ne dors pas la nuit qui suit, alors, si tu peux éviter cette fois-ci !

– Tu ne veux pas que je fasse parler le flic en attendant les consignes ?

– Pour qu’il n’en reste plus rien ? Et si jamais il faut le garder en vie ?

– Je sais être délicat parfois, on dirait que tu me prends pour un monstre.

L’échange est interrompu par la sonnerie du téléphone. Les instructions arrivent. Anton est silencieux pendant toute la durée de l’appel. Il raccroche et se dirige vers la grange en prenant avec lui le bidon d’essence qu’ils avaient préparé à leur arrivée.

– Viens avec moi ! On n’a pas encore mangé, je vais te payer un petit barbecue maison.

Quand ils ouvrent la grande porte de bois vermoulu, les derniers rayons de soleil de la journée entrent et illuminent l’intérieur de la bâtisse en bois. La poussière soulevée par un courant d’air scintille comme des milliers de paillettes d’or en suspension.

Pavel marche d’un pas déterminé vers le sublime coupé allemand.

-Coucou mon trésor, on arrive…

Chapitre 39  by Maud, de « Les lectures de Maud »

Se relever et rebondir

Amanda se relève et s’assoit sur le canapé, le temps de faire le point. Deux pensées émergent immédiatement : « La perruque est tombée, Louise a vu sa vraie couleur de cheveux et aura sûrement de nombreuses questions. Et qui est le boiteux qui a essayé de la tuer ? »

Depuis qu’elle exerce ce métier, elle ne s’est pas fait que des amis, mais elle n’a jamais cru ni au hasard, ni aux coïncidences. Une certitude, Lalande a mis un contrat sur sa tête. Elle s’en occupera plus tard. Il y a urgence : il faut quitter rapidement les lieux maintenant que son adresse est connue, et terminer sa mission.

Encore chancelante, elle profite du départ précipité de Louise pour sortir de l’appartement, n’emportant que son sac et sa perruque. Une fois dans la rue, elle s’apprête à héler un taxi mais se ravise. Prudence, les chauffeurs sont parfois physionomistes. Amanda sort son téléphone et appelle Gaston sous prétexte de prendre des nouvelles de sa collègue Valérie Rémini, blessée.

« Elle est hors de danger, mais toujours hospitalisée.

– As-tu eu le temps d’aller la voir ?

– Non, ici c’est le feu ! En plus, nous sommes sans nouvelles d’un autre collègue qui rendait visite à une patiente en HP.

– Ah bon ! Si je peux t’aider en allant visiter Valérie pour toi, ça me ferait plaisir de te rendre service.

– Tu es formidable, c’est très gentil. Peux-tu lui apporter des fleurs ?

– Bien sûr, indique-moi l’hôpital, le service, le numéro de la chambre et je me mets en route.

– Je me renseigne et t’envoie les informations par sms. Je vais prévenir le personnel de ton arrivée afin qu’on te laisse passer. Je te remercierai avec un bon dîner »

Ils raccrochent, Gaston sur un nuage, chanceux d’avoir rencontré une femme aussi belle, gentille et attentionnée, Amanda, le sourire aux lèvres de bientôt pouvoir honorer son engagement. « Encore plus facile que je ne l’aurais imaginé. Pour le dîner, il rêve » pensa-t-elle.

Elle s’élance en courant jusque chez le fleuriste, mais la douleur provenant de ses côtes la rappelle à l’ordre. Après un ultime crochet par la pharmacie, elle défait l’emballage de la seringue stérile et la glisse immédiatement dans le méandre des tiges du bouquet. C’est concentrée et le cœur léger qu’elle descend les marches du métro. Ses pensées vont et viennent. Son ultime objectif : se débarrasser de Lalande. Le sms avec les renseignements attendus arrive enfin. Direction Lariboisière…

Episode 40 By Clémence

Fatale injection

Louise, encore sous le choc de sa rencontre avec le boîteux, téléphona à son père :  – Allo papa ?

– Oui ma chérie, justement je voulais te parler. Est-ce que tout va bien ? s’inquiéta Max.

– Non, papa ! C’est à propos de la nouvelle voisine de Mamie, Amanda. Eh bien, j’étais chez elle, et un homme est entré dans l’appartement et l’a blessée. Quand il m’a entendue, il s’est sauvé. J’ai juste eu le temps de voir qu’il boîtait. Je suis sûre qu’il cherchait la clé USB de Camille.

– Quoi ? Mais où est-elle maintenant, cette Amanda ?

– Je ne sais pas, papa, elle est partie mais tu sais, elle était blessée ! Et je pense qu’elle est gravement malade… Elle porte une perruque.

– Ecoute moi, Louise, c’est très important. Il va falloir que tu t’enfermes avec mamie et que tu n’ouvres la porte à personne !

 – Mais Pa…

– C’est un ordre ! coupa Max.

Le profil de Fantômette commençait à s’éclairer. Max voulut une nouvelle fois en informer Sebastián mais son téléphone restait sans réponse… Pendant ce temps, Amanda s’était rendue à l’accueil de l’hôpital et se présentait à l’agent administratif qui lui confirma le numéro de chambre de Valérie. Les yeux clos, celle-ci ne la vit pas entrer et déposer le bouquet à son chevet… Elle sentit néanmoins une présence et voulut ouvrir les yeux mais eut soudain la sensation d’étouffer. Des bips alarmants se mirent en route. Elle essaya en vain de se redresser pour appeler au secours… Amanda venait d’injecter de l’air, avec la seringue qu’elle s’était procurée, dans les veines de sa rivale, pour provoquer une embolie fatale. Notre tueuse s’enfuit rapidement avant l’arrivée de l’équipe soignante alertée par le vacarme des machines.

Pendant ce temps, Max tentait toujours de joindre Sebastián.

 « Bonjour, vous êtes bien sur le répondeur de Sebastián, veuillez laisser votre message »…

De son côté, le co-équipier de Valérie n’était pas mieux loti. Réduit à l’état de saucisson, il entendit des bruits de pas sans saisir exactement ce que les deux zigottos étaient en train de comploter. Soudain, son odorat se mit en alerte. Ça sentait le feu… Attaché, il se contorsionna pour essayer de se libérer et ne parvint qu’à s’entailler les poignets. Il tenta d’allonger les jambes et sentit soudain un objet dur sous ses pieds.  Et s’il tenait la solution à son problème ?

Episode 41  by Michæl Corbat

Sauvée !

«Que se passe t-il, ici ? demande le médecin réanimateur qui arrive en courant.»

Dans la chambre de l’hôpital, deux infirmières s’affairent au-dessus du corps inanimé de Valérie. La première commence un massage cardiaque, l’autre attendant les instructions.

«Bien, injectez-lui un milligramme d’adrénaline ! Et préparez le ventilateur, pendant ce temps je vais l’intuber ! Quelqu’un a vu ce qu’il s’est passé ici ? Où est le flic censé surveiller les allées et venues ? interpelle le médecin. Appelez une aide-soignante, qu’elle aille à la pêche aux infos !»

Tout en effectuant des gestes d’une précision horlogère, le médecin réfléchit à mille à l’heure. Il est perplexe. Jusqu’à présent, Valérie était stable et tirée d’affaire. Il n’y a aucune raison qu’elle rechute.  Même si, en médecine, il peut y avoir des événements inexpliqués, il a du mal à y croire.

Quelques minutes plus tard, Bérénice, l’aide soignante, revient, affolée :

«Un visiteur nous a rapporté qu’il avait vu une jeune femme entrer et sortir, de manière assez louche. Elle paraissait blessée, essoufflée, et s’est empressée, malgré tout, de déguerpir du couloir, comme si elle était poursuivie. Quant au flic, il vient de remonter. Il a reçu un coup de fil de ses supérieurs lui ordonnant de descendre les rejoindre à sa voiture, sur le parking de l’hôpital. Apparemment, il a attendu en vain, personne n’est jamais venu… Je le fais entrer ?

– Oui, qu’il entre. Mettez-moi en ligne avec le commissariat. Et qu’on me passe l’inspecteur Pichon. C’est lui qui a repris le commandement, apparemment. Stoppez le massage, on attend…»

Suspendu aux voyants du monitoring, le personnel médical retient son souffle. Quelques secondes plus tard, un bip se lance, leur indiquant que Valérie respire de nouveau…

…alors qu’au même instant, quelques rues plus loin, la respiration saccadée d’Amanda la force à s’arrêter. Saloperie de côtes cassées ! Elle sait aussi qu’avec son allure et sa dégaine, elle ne pourra pas aller loin sans se faire repérer. La douleur lui arrachant la poitrine et la faisant vaciller, elle souffle un instant. Oui, voilà, s’arrêter, réfléchir, choisir un tripot un peu glauque où elle pourra se noyer dans la masse des buveurs de bières et autres joueurs de tiercé. Elle entre dans un bar…

Suite à l’appel du médecin, Gaston Pichon comprend, quant à lui, qu’il s’est fait manipuler… Quel naïf il a été ! Quel con ! Sa carrière aurait pu prendre un sérieux coup dans l’aile mais, par bonheur, l’honneur est sauf. Personne dans l’équipe ne l’a vu parler avec cette foutue Amanda. Il ne lui reste plus qu’à sortir un portrait-robot et à le diffuser à l’échelon national ! L’aspirant lieutenant va devenir grand, s’enorgueillit-il…

6 réflexions sur “Exquis Cadavre Exquis, la troisième récap !

Répondre à  Ahhh, quel titre ! » : Un nom pour notre cadavre exquis. – A vos crimes ! Annuler la réponse.

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