Sommeil de cendres, Xavier Boissel

Le livre : Sommeil de cendres de Xavier Boissel. Paru le 16 juin 2022 chez 10-18 grand format. 14€90. (282 p.) ; 20 x 13 cm

4e de couv : 

Trois destins, trois clandestinités, trois énigmes…

Paris, janvier 1974. Alors qu’une tempête s’abat sur l’Europe occidentale, la Police judiciaire parisienne découvre le cadavre d’un homme sur le périphérique : un étudiant maoïste de bonne famille a été mutilé. L’enquête est menée par l’inspecteur Éperlan, un vétéran de la guerre de Corée, froid et méthodique. Elle va le conduire des cercles de jeu de la capitale au campus de Vincennes, haut lieu du gauchisme des années 1970.

Dans le sillage du cadavre apparaît bientôt l’énigmatique Alexia Zorn, fuyant Paris, la pègre à ses trousses. D’autocar en auto-stop, elle rejoint les Cévennes ardéchoises.

Dans ce paysage de neige perdu au milieu des montagnes se tapit le menaçant Müll, homme du Service d’action civique, tout juste rentré du Maroc avec un chargement de cocaïne.

Ces trois destins semblent inexorablement mêlés. Pour Éperlan, la question est de savoir comment. Et jusqu’à quand.

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L’auteur : Xavier Boissel est né en 1967 à Lille. est professeur de français. Il est l’auteur de plusieurs essais dont Paris est un leurre (éditions inculte) et de deux romans parus aux éditions inculte (Autopsie des ombres et Rivières de la nuit) et d’un polar acclamé par la critique et les libraires, Avant l’aube, paru aux éditions 10/18

Extraits : 
«Quatre perturbations d’ouest avaient déjà traversé l’Europe entre le 12 et le 15 janvier 1974. Dans la nuit du 16 au 17 janvier, après s’être positionné sur l’Islande, l’ensemble dépressionnaire toucha la Bretagne et les régions proches de la Manche, causant la perte de plusieurs navires et entraînant la mort ou la disparition de quarante-cinq personnes en Europe occidentale. Dans la journée, la tempête meurtrière atteignit l’Île-de-France, avec des vents violents, dont certaines rafales furent mesurées à plus de 100 km/h. Le soir, après avoir annoncé l’accord du dégagement des troupes en Israël, le présentateur du journal de la seconde chaîne de l’ORTF fit le point sur les dégâts occasionnés. Le propos fut illustré par l’effondrement d’un mur sur des voitures en stationnement à Laval, en Mayenne. À 23 h 47, une bourrasque s’engouffra dans la rue de Rivoli et un automobiliste perdit le contrôle de son véhicule, une Dauphine immatriculée dans les Yvelines qui alla percuter une arcade de l’hôtel Brighton. Il fut tué sur le coup. La rafale balaya le jardin des Tuileries, poursuivit sa course impétueuse jusqu’au clocheton de la Direction de la police judiciaire parisienne et cingla une vitre du deuxième étage du bâtiment, qui donnait sur la Seine. Michel Éperlan, un officier de la Brigade criminelle qui fumait en regardant les eaux boueuses du fleuve, se dit que 1974 serait une année de merde.»
« Elle s’installa à côté de lui, heureuse d’être enfin arrivée au terme du voyage, de sa folle cavale qui l’avait amenée de la banlieue parisienne au cœur de ces terres –rudes, pentues, austères, où des générations de paysans opiniâtres avaient rivalisé d’ingéniosité et de labeur, afin de bâtir sur des sols pauvres des murets de pierres sèches, au flanc desquels fleurissaient les châtaigniers, objets de luttes constantes, d’efforts répétés, de négation douloureuse du donné qui nourrissait l’orgueil et dont ils tiraient orgueilleusement leur pain-, terres maintenant promises à l’abandon, traversées par un lointain murmure, les voix des vieilles gens qui étaient restés, ouvrant les voyelles, dévidant des phrases où raisonnaient les consonnes, reliques sonores d’un temps révolu. »

Dans le tote bag polar de Sylviane

 

SOMMEIL DE CENDRES – Xavier Doissel

 Juin 2022 ; 10/18

(Prix France Bleu l’histoire du polar)

 

Avec les prévisions météorologiques du mois de janvier 1974, tempétueuses, des bourrasques et de fortes averses, Xavier Boissel nous informe dès les premières pages, de l’atmosphère du roman.

L’inspecteur Michel Eperlan, officier de la police judiciaire fume beaucoup de cigarillos Café Crème et remonte le col de son imperméable. Il aime la musique américaine qu’il a découvert lors de son engagement militaire en Corée.

Il est appelé pour un cadavre retrouvé sous l’échangeur de la porte de Bagnolet.

C’est celui de Ghislain, étudiant en pharmacie et fils de bonne famille. Un temps révolutionnaire puis un temps à fréquenter « une drôle de faune », dixit sa mère.

Le même jour, Alexia fuit pour échapper à deux tueurs en prenant un train de nuit, assise dans un compartiment avec des photos de paysages en noir et blanc.  Elle va se cacher au fin fond de l’Ardèche, au village de la Souche où un vieux paysan va l’aider pendant cette retraire forcée. Ça sera aussi l’occasion de faire un point sur son passé. Dans sa fuite, elle a réussi à mettre de l’argent et un flingue dans un sac.

Ghislain était son petit ami qui l’entrainera malgré elle dans ses embrouilles foireuses voire dangereuses à vouloir flouer des truands.

Un troisième personnage arrive dans l’histoire, Otto Müll, membre du SAC (service d’action civique), chargé de rapporter du Maroc, des pains de cocaïne. On le suivra dans des rendez-vous et rencontres où se mêlent politique et grand banditisme.

Peu à peu, l’inspecteur Eperlan, tenace et méticuleux, retrace le cheminement et met en évidence les liens que peuvent avoir entre eux, les personnages de l’histoire.

Attentif au moindre détail, il parvient aussi à retrouver Alexia jusqu’en Ardèche.

Il ne sera pas le seul à trouver la route vers le village de La Souche.

Les années 70, c’est une époque qui n’est pourtant pas si lointaine mais déjà on nous en raconte l’histoire sociale et culturelle.

Xavier Boissel a dû se replonger dans une multitude de documents de tout genre pour s’inspirer de la situation politique de ces années mais aussi pour nous les raconter avec autant de détails.

Les descriptions sont assez précises pour faire un retour sur des souvenirs d’enfance quand on portait des sous-pulls en acrylique, des survêtements avec un écusson de l’AS Saint Etienne et que les murs étaient couverts de papier-peint à grosses fleurs. Il y a non seulement les modèles mais aussi les couleurs des voitures, les marques de cigarettes JPS, les Rothmans, et les Gitanes Maïs écrasées dans des cendriers estampillés avec des noms d’apéro d’avant comme Cinzano, la mode vestimentaire avec des pattes d’éléphant et une robe vert pomme.

On n’oublie pas de se restaurer tout au long du récit.

Que ce soit dans des brasseries pour choisir des plats à la carte, toujours accompagnés de vin, ou à une table avec une nappe à carreaux d’un bar PMU pour prendre un petit-déjeuner, pour avaler des sandwiches jambon-beurre ici ou là, se faire une omelette sur un coin de table en formica ou manger la blanquette de veau, proposée au menu d’un hôtel de province, assis face à la tête d’un sanglier empaillé.

On quittera les ambiances enfumées pour prendre les chemins des montagnes ardéchoises au petit matin, encore glacé, sous un ciel bleu ou une route enneigée.

J’aurai aimé avoir un peu plus de précisions sur le contexte politique de ce roman, la fin de Georges Pompidou, l’élection de Valery Giscard D’Estaing.

Cependant, cela m’a plu de faire une virée en compagnie de Michel Eperlan pour une lecture comme un roman noir de cette époque.

Avec l’évocation de Philippe Marlin, je me suis rappelée l’autre roman de Xavier Boissel, « Avant l’aube » que j’avais aussi beaucoup aimé.

Je lui ai demandé si « Sommeil de cendres » était aussi noir… la réponse a été nuancée, pas autant…Et bien je ne suis pas d’accord, c’est aussi noir.

 

A la fin du livre, on trouve les références bibliographiques des épigraphes et citations littéraires que Xavier Doissel a ajouté tout au long du livre.

Je me permets de lister la musique écoutée sur un transistor, à l’autoradio de leurs voitures, ou en passant des vinyles sur un tourne-disque ou même sur une affiche collée au mur.
Donald Byrd, Christo Retendor,
America, Chanson Horse with no name,
Les Beatles dans la salle d’attente de la gare de Lyon Perrache
Linda Ronstadt, Long, Long time
Jonny Cash, The city of New Orleans,
Film Delivrance, John Boorman, B.O.
Europe N°1, Dalida, Michel Sardou,
Joe Dassin, Salut les Amoureux
Roy Orbison, blu Bayou
Simon and Garfunkel, Olympia, Concert du 1er Mai 1970
David Bowie
Hank Williams,
Everly Brothers, All I have to do is dream

 

RTL, Georges Lang, Les Nocturnes
Emission encore programmée depuis les années 60

 

Et pour refaire les randonnées d’Alexia
Ardèche, village de la Souche

 

Autres extraits :
« Il maudissait l’âpreté de la neige plus que les hommes eux-mêmes. Au nord du 38 ème parallèle, la ligne James-Town ne bougeait pas. On laissait les morts ensevelir les morts. Les soldats s’enlisaient. Les négociations s’enlisaient. »
«Taleb-le-taciturne évite une ornière d’un violent coup de volant, la crosse du pistolet semi-automatique heurte les côtes de Müll, qui grimace. Il desserre la ceinture de son étui pour descendre vers sa hanche son Beretta 70, une arme de calibre 7,65 mm achetée il y a quelques années à un trafiquant de Saint-Ouen et dont il apprécie, outre la compacité, la détente simple et double action, et au surplus, le fait que le pontet soit strié pour une préhension renforcée en cas de tir soutenu. Devant lui, les phares du pick-up balaient la route. Il fixe pendant quelques minutes les essaims d’insectes qui tournoient dans les deux pinceaux de lumière. Il s’assoupit.»

2 réflexions sur “Sommeil de cendres, Xavier Boissel

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