La GAV : @Jean Luc Bizien sous le feu des flingueuses, 3ème audition. 3/4

La GAV : @Jean Luc Bizien sous le feu des flingueuses, 3ème audition. 3/4

Suite de la Garde à vue de monsieur

Jean Luc Bizien

3e interrogatoire par Miss Aline et notre Nervi Nick Gardel 

 

Avec de nombreuses Flingueuses derrière la vitre teintée


La GAV, Garde à vue d’un auteur par Collectif polar c’est : 4 interviews d’un même auteur par 4 flingueuses différentes.

La GAV c’est des interviews en direct, du vrai live, en conditions réelles.

Durant 2 jours nous kidnappons en quelques sorte un auteur de polar.

Nous lui demandons de nous consacrer au minimum 4h de son temps sur les deux jours que dure la Garde à Vue.

Et durant ce temps nous lui posons une série de questions en batterie auxquelles il ou elle doit répondre instantanément. Nous ne lui laissons pas le temps de réfléchir à ses réponses. C’est un échange en live. Comme sur un plateau, sur un salon. C’est pas préparé,  ce que l’on recherche c’est la spontanéité. Et croyez moi au réveil ou en fin de journée, nos auteurs sont comme nous, soit pas bien réveillés soit crevés de leur journée. Et là nous les cueillons !

Nous recueillons leurs confidences.

Et c’est celles-ci que nous vous proposons en direct live. ( enfin presque juste en léger différé).

Nous allons vous proposer la retranscription de ces 4 interrogatoires sur 2 jours, 1 en matinée et un le soir entre ce matin et demain  après-midi

Allez place à la GAV de Jean Luc Bizien



Miss Aline : Bonjour à tous et toutes, Bonjour @Jean-Luc
.
Geneviève : Salut Jean-Luc. Bonjour mes flingueuses et mister Nervi.
Nick et miss Aline😍

Dany : Suis là mais …. cachée ! Bonjour tous et la Miss ! 
et la Cheffe !

Miss Aline 😍

Dany : Comme cela la GAV de monsieur Jean-Luc Bizien  reprend.
Geneviève et Aline 👍

Nick : En attendant le prévenu, je lance Ghost of Tom Joad. Ça le fera venir

Geneviève :  Bonne idée ça Nick 👍  je vais le chercher dans sa cellule

Nick,  Dany et Misse Aline : 👍

Geneviève : Nous voilà, Aline , Nick, monsieur Bizien est à vous

Miss ALine :Comme d’autres auteurs, vous utilisez un pseudo. Qu’est-ce qui pousse/amène un auteur à utiliser un pseudo ? D’autant plus que le public fini par savoir qui est qui !

Jean-Luc : J’assume tous mes textes, des albums jeunesse aux romans les plus sombres. Je n’ai jamais honte de quoi que ce soit, dans la mesure où j’écris par CHOIX et pas par obligation. Je n’écris ni sur commande, ni par hasard. J »éprouve l’envie de raconter des histoires et je m’enferme quelque part, face à mon clavier, pour leur donner forme.
Dès lors, chacun de ces textes est une partie de ma production, que je me dois de reconnaître.
Pour autant, passé un certain seuil de notoriété, le nom d’un auteur devient une marque.
Ça n’est ni de la mégalomanie, ni une provocation, mais un constat.
J’ai publié plus d’une cinquantaine d’albums jeunesse, qui se sont écoulés à plus de deux millions et demi d’exemplaires. On peut considérer qu’en jeunesse, mon nom est une marque (qui correspond peu ou prou à un label dans la catégorie « Livres-jeux »).
Idem, pour les thrillers adultes, ou le jeu de rôle.
Voilà la raison pour laquelle j’ai pris un pseudonyme en publiant deux séries de romans pour feu Gérard de Villiers.
Pas parce que je me sentais honteux de le faire – contre toute attente, j’étais EXTRÊMEMENT FIER d’avoir été contacté par Serge Brussolo et de faire partie des quelques auteurs retenus pour officier chez Vauvenargues – mais parce que je ne voulais pas tromper les gens sur la marchandise.

On sait que la plupart des lecteurs ne font pas attention à l’éditeur, qu’ils sont incapables de citer la maison d’édition ou la collection…
Je ne voulais pas qu’un lecteur de ma série historique chez 10-18 (série littéraire, pour laquelle j’ai soigné autant la forme que le fond) se retrouve floué en achetant sur mon nom un poche qui présentait une toute autre facette de mon travail.
Voilà pourquoi j’ai pris deux pseudos, pour animer deux séries aux antipodes de ce que je faisais jusqu’alors.

Miss Aline : merci, je comprends mieux du coup les raisons d’un changement « d’identité’.

Jean-Luc : C’est juste du professionnalisme, Aline (et un fond d’honnêteté intellectuelle 😉 )
En revanche, certains lecteurs se sont empressés d’enquêter et, une fois mon identité trouvée, se sont répandus sur les réseaux sociaux comme des abrutis, pour expliquer à qui voulait bien les lire que Vuk Kovasevic ou Sean McFarrell, c’était Jean-Luc Bizien.
Peut-être ce sont-ils sentis importants, drapés dans leurs déguisements de Sherlock Holmes de Monoprix, mais ils ont fait beaucoup de mal… aux lecteurs qui se seront dirigés vers ces séries qui ne leur étaient pas destinées.

Nick : Qu’est-ce qui motive chez toi le passage d’un style à l’autre ? La prise de décision pour faire un roman « ado » ou un roman plus sombre ou un roman quasi historique ?

Jean-Luc : Le sujet, d’abord.
L’écriture, ensuite.
J’entends par là que j’éprouve l’envie d’écrire une histoire, que je m’y consacrer… et que je vois après quelques chapitres à quel public elle est destinée.
Au vrai, je n’écris jamais pour les adolescents.
Je suis persuadé qu’écrire « pour les ados » ou « pour la jeunesse », c’est se fourvoyer.
Parce qu’on va être tenté de s’autocensurer, d’adresser des messages (ou pire encore : de faire la leçon !)…
J’ai une approche plus anglo-saxonne de la littérature pour les ados : un bon roman ado, ça n’est pas écrit pour eux. C’est écrit pour tout le monde et LISIBLE par des ados.
Une fois que la décision est prise, que je sais qu’un roman sera publié dans cette catégorie, j’applique à mon travail les mêmes règles : jamais de violence gratuite, jamais de scènes complaisantes. Tout doit être au service du récit. Enfin, la seule limite que je m’impose pour les ados est celle de la violence. Pas la violence physique – ils peuvent tout lire à ce sujet après les heures passées devant leur jeux vidéos ou Internet ! – mais psychologiques.
Je n’oublie jamais que la lecture, parce qu’elle nous amène à projeter, à imaginer, peut se montrer bien plus perturbante que des films, des séries ou n’importe quelle image projetée sur un écran.

Nick : Il faut forcément que des gens peu ouverts construisent des échelles de valeur entre les écrits… En fonction d’ailleurs de leur propre critères…

Jean-Luc : Il y a surtout une espèce de course bizarre, dont les règles ont été établies par certains blogueurs et qui les mènent à faire toujours plus, toujours plus vite.
Pour montrer qu’on a reçu les livres en premier, qu’on les a lus et chroniqués en premier, qu’on est le plus rapide, le plus beau, le plus fort.
Autant de comportements que je n’adoptais déjà plus en 5ème B (ce qui remonte au siècle précédent, il y a donc prescription).

Nick : Mais n’y a-t-il pas une prise de risque assez énorme de renoncer à un lectorat établi, à la « marque » de l’auteur, en prenant un autre nom ? »

Jean-Luc : Vaste sujet. c’est toujours compliqué, parce que cela implique que tu repars à zéro.
Il faudrait en parler à Ian Manook/Roy Braverman.
Je ne me suis jamais posé la question, parce que le choix s’est imposé naturellement.
Cela dit, si un jour la série des Vuk Kovasevic devait paraître à nouveau, ce serait sous mon nom.
Maintenant que le secret est éventé, autant reprendre la main.

Nick : Le sujet vient donc avant l’écriture ? C’est lui qui te guide vers une nouvelle histoire, un nouveau roman et finalement le style qui va avec ?

Jean-Luc : Oui. J’ai besoin d’un sujet fort pour me mettre au travail. je suis un grand fainéant (et en tant que tel, je suis capable de beaucoup travailler, dans des moments précis). J’attends donc d’être suffisamment motivé pour m’y mettre. D’avoir accumulé assez d’idées (j’ai toujours en tête la scène de départ, celle qui me permettra « d’accrocher le lecteur » et de l’amener à tourner les pages, et la scène finale, celle qui me permettra de le bluffer). Au milieu, je n’ai aucune idée de ce qui va pouvoir se passer. En revanche, je sais TOUT de mes personnages avant de commencer à écrire. C’est un peu la technique du jeu de rôle : les personnages sont confrontés à une situation problématique et je les observe. Il ne me reste plus qu’à mettre en forme leurs réactions, sur le papier.
Quant au style…
J’avoue ne pas le travailler. Il vient naturellement, selon le sujet, selon l’époque. Je travaille en musique et le rythme des phrases en découle. Sans que j’en ai conscience :  je me suis aperçu en parvenant à la tout fin de l’ouvrage que j’avais adopté le style des feuilletonistes pour la série La Cour des miracles, et que cela n’avait rien à voir avec la musicalité du texte de la série des Ténèbres.

Nick : Un rituel d’écriture ? Ou déroulement récurrent ?

Miss Aline : quels sont vos rituels d’écriture : lieux, musique, rythme de travail, part de recherches, etc ?

Jean-Luc : J’écris n’importe où, n’importe quand. Dans l’avion, dans le train, à l’hôtel, dans un bar…
Je ne me sépare jamais de mon vieux MacBook.
Quand je suis dans le métro, un ticket fait l’affaire. Je gribouille, je prends des notes et, dès que l’occasion se présente, je transfère tout ça au propre.
Mon disque dur est gavé de notes pour de futurs romans.
Chez moi, en revanche, tout est ritualisé.
Le matin, c’est douche et café (dans le désordre, selon l’humeur).
Ensuite, au deuxième café, direction le bureau – mon antre, où on trouve la bibliothèque, la cédéthèque et les guitares. Là, je suis seul, même le chat est interdit de séjour.
Je choisis les albums qui vont accompagner ma journée, en fonction de ce que j’ai envie ou besoin d’écrire.
J’écoute la musique… et mes doigts suivent le rythme.
C’est parti pour une journée de 8 à 12 heures d’écriture, selon la forme et l’inspiration.
J’aime la vibration particulière des bars (surtout à Paris). Je m’isole en écoutant ma musique au casque, mais je perçois les mouvements autour de ma bulle.
J’aime aussi le calme parfait de mon bureau – qui s’ouvre sur le maquis et le silence absolu.
Je me nourris de l’un comme de l’autre.
Quant à la programmation musicale, elle est pour le moins éclectique. Disons, pour faire court, qu’elle tourne autour de Bruce Springsteen, mais que le spectre est large, de Jordi Savall et sa viole de gambe à Lemmy Kilmister et sa base Rickenbacker, en passant par les Rolling Stones ou Sopor Aeternus.
Peut-on réellement parler de rituels – autres que sacrificiels –, après tout ça ?

Je crois, en ce qui concerne le rapport à la musique, que cela correspond à une génération qui a grandi avec elle. Une génération qui a appris la musique en frissonnant devant des bandes son au cinéma, qui a écouté les génériques des premières séries TV (Chapeau melon et bottes de cuir, Amicalement vôtre, Le Prisonnier, etc.)
C’est pour cela que nous sommes tout une armée (dans la Ligue de l’Imaginaire comme en dehors) à éprouver le besoin de parler de musique dans nos romans et autour – en proposant une liste d’accompagnement pour la lecture, par exemple.

Nick – c’est très perturbant de voir le nombre de points communs que je retrouve dans tes rituels et tes « vibrations »

Jean-Luc: je m’en doutais un tantinet, mais chuuuut ! 🙂

Dany : Pourquoi vous cacher les garçons, il n’y a pas de honte !!!

Jean-Luc : Parce que quand ça devient personnel, je ne m’étale pas sur les réseaux sociaux.
On ne se manifeste pas devant les civils. 🙂

Nick : Tu as des repentirs fulgurants ? Tu corriges beaucoup ? Tu sabres ou tu développes ?

Jean-Luc : J’écris tout d’une traite, sans me poser de questions – sinon, je demeure paralysé, stupéfait devant une phrase que je ne sais pas reprendre… et je perds du temps et de l’énergie.
Une fois que la première version est bouclée, je laisse reposer. N’importe quel cuisinier vous le dira : les plats, c’est encore meilleur réchauffé.
Après quelques jours, je reprends le texte sans état d’âme.
J’ai souvent l’impression de lire le texte d’un étranger et je suis sans pitié.
C’est un peu comme au cinéma, quand on pénètre en salle de montage.
C’est à ce moment précis que le vrai boulot commence.
Je coupe, je monte, je démonte…
Mon ami Romuald Giulivo (un fabuleux écrivain que je vous recommande plus que chaudement) a un jour défini ma méthode de travail.
— D’abord, tu écris un livre… Ensuite, tu conjugues les verbes.
Drôle, cruel…
Mais juste !

Nick : Est-ce qu’il t’arrive de rajouter des parties ?

Jean-Luc : Oui, bien entendu.
Cela dit, j’ai beaucoup de chance : le premier jet est souvent le bon. Sauf cas extrême – cela m’est arrivé pour l’un des épisodes de la série La Cour des Miracles, qu’il a fallu entièrement reprendre (à ma décharge, j’étais en plein divorce et j’avais une partie du cerveau fortement occupée à mener une résistance de type afghane face aux chars russes) – j’ai assez peu de corrections sur la forme. Comme je l’ai dit précédemment, le style s’impose sans que j’en ai conscience.
On notera à cette occasion le travail de l’éditeur, crucial dans ce cas précis. Emmanuelle Heurtebize a su trouver les mots : elle m’a expliqué pourquoi mon texte ne fonctionnait pas, pourquoi il fallait absolument le reprendre et ce que cela entraînait.
C’est la différence entre un auteur publié à compte d’éditeur et un auto-édité : le regard extérieur, l’intervention essentielle de l’éditeur. C’est parfois intrusif, souvent violent, toujours désagréable…
Mais c’est nécessaire.

En phase finale, après relecture, c’est sur le fond que j’apporte des modifications. Chapitres supplémentaires, simples paragraphes ajoutés ici ou là, dégraissage ponctuel, ajout de muscle ou d’ossature…
C’est de la chirurgie de champ de bataille, mais c’est le genre qui veut ça : en thriller, tout est question de rythme et de mécanique.
Un seul rouage est défaillant et c’est l’ensemble des aiguilles qui bégaye.

Nick : 👍 la preuve ? Mon clavier bégaye lui aussi avec un « qui » surnuméraire ! 😉

Dany : 😆

Dany : Je crois qu’il est temps de renvoyer le prévenu dans sa cellule. Il fatigue !

Jean-Luc : Son clavier, surtout… 😉

Dany : Je pense qu’on peut effectivement le remercier d’avoir combattu sa sinusite en notre compagnie …

Nick : Un témoignage d’une grande qualité, dois-je le préciser ? (Sans aucune surprise de ma part, je m’attendais à la qualité…)

Jean-Luc : 😍

Jean-Luc : Encore une fois, désolé pour le retard à l’allumage.
(Nick : Tom Joad, c’est le BIEN !)

Je file me refaire un café !
(Et je mets mon réveil à sonner aux alentours de 17h.)

Dany : Jean-Luc, merci beaucoup pour ta sincérité et ta confiance, Miss Aline se joint à moi pour te dire à ce soir. 
Nick pour ta première GAV en tant que tortionnaire merci aussi.

Jean-Luc : De nada. Expérience enrichissante – même s’il faudra que je relise tout ça, parce que taper aussi vite empêche de réfléchir et de structurer le propos. Je redoute d’avoir écrit un paquet d’inepties…

Nick : Merci à tous pour ce moment. A bientôt. (très bientôt JLB…)

Jean-Luc : 👍

Dany : Bon appétit les amis et à bientôt. Geneviève,  on raccompagne le prévenu en cellule mais on ne lui laisse pas la clef !

Geneviève : Ok les enfants, je mets fin à cette 3ème auditions. Merci Miss Aline, merci Nick, de très intéressantes révélations !

6 réflexions sur “La GAV : @Jean Luc Bizien sous le feu des flingueuses, 3ème audition. 3/4

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