La GAV : Ludovic Miserole sous le feu des flingueuses, troisième audition. 3/4
Suite de la Garde à vue de Monsieur
Ludovic Miserole
3e interrogatoire par Fanny Haquette
La GAV, Garde à vue d’un auteur par Collectif polar c’est : 4 interviews d’un même auteur par 4 flingueuses différentes.
La GAV c’est des interviews en direct, du vrai live, en conditions réelles.
Durant 2 jours nous kidnappons en quelques sorte un auteur de polar.
Nous lui demandons de nous consacrer au minimum 4h de son temps sur les deux jours que dure la Garde à Vue.
Et durant ce temps nous lui posons une série de questions en batterie auxquelles il ou elle doit répondre instantanément. Nous ne lui laissons pas le temps de réfléchir à ses réponses. C’est un échange en live. Comme sur un plateau, sur un salon. C’est pas préparé, ce que l’on recherche c’est la spontanéité. Et croyez moi au réveil ou en fin de journée, nos auteurs sont comme nous, soit pas bien réveillés soit crevés de leur journée. Et là nous les cueillons !
Nous recueillons leurs confidences.
Et c’est celles-ci que nous vous proposons en direct live. ( enfin presque juste en léger différé).
Nous allons vous proposer la retranscription de ces 4 interrogatoires sur 2 jours, 1 en matinée et un le soir entre hier matin et cet après-midi
Allez, place à la GAV de Ludovic Miserole
Fanny : Hello
Ludovic : Hello Fanny
Fanny : le prévenu est-il réveillé ?
Ludovic : Oui. La tête dans le … mais ça va ! Le matelas n’est pas très confortable
Fanny : Quelle souplesse ! Ce n’est pas non plus un 5 étoiles ! Bon, commençons cet avant-dernier interrogatoire afin de voir si nous pouvons peut-être envisager une libération ce soir !
Geneviève : Hello les flingueuses, bonjour Mister Ludovic. Reprise des auditions ce matin donc…après une nuit agitée sans doute !
Ludovic : Oui, mais au moins, ici, je suis au frais
Fanny : Hello Cheffe !
Geneviève : C’est le cas de le dire, on a mis notre prévenu au frais. Je vous surveille tous les deux derrière la vitre teintée.
Fanny : Revenons donc à ta complice, Rosalie. Si tu pouvais la rencontrer, que souhaiterais-tu lui dire ? Quel message lui délivrerais-tu ?
Ludovic : J’aimerais lui dire que sa vie ne fut pas vaine. Que la compassion dont elle a fait preuve envers les prisonniers et les condamnés à mort fut pour beaucoup d’entre eux une lueur d’humanité dans ces couloirs obscurs. J’aimerais lui dire que pour moi, sa vie ne se résume pas à ces 76 jours passés aux côtés de Marie-Antoinette. Et lui demander surtout si j’ai été à la hauteur de son incroyable destin. Elle était une femme très discrète. J’espère ne pas l’avoir gênée en partageant son histoire.
J’aimerais lui poser des tonnes de questions. Sur elle, sur sa fille et l’identité du père de celle-ci. C’est une femme qui manqua cruellement de tendresse et de compassion alors qu’elle en a offert à beaucoup. Voir à quoi elle ressemblait
Fanny : Tu aurais aimé pouvoir passer du temps auprès d’elle donc, quelques jours.
Ludovic : Oh oui !!!
Fanny : Tu n’as pas retrouvé de portrait ?
Ludovic : Non. Je sais qu’il en existât au moins un. La fille du peintre Boze, qui rendait visite à son père en prison, a peint son portrait en 1793. Rosalie le montra à une historienne venue l’interroger en 1836. Je ne sais ce qu’est devenu son portrait à sa mort.
Fanny : Une enquête pour toi peut-être un jour ?
Ludovic : Tout comme il doit exister des photographies de sa fille, mais je ne suis pas encore parvenu à mettre la main dessus. Un jour peut-être. Je ne désespère pas
Fanny : Oui si on te libère bien sûr…
Ludovic : Je suis parvenu quand même à trouver un document qui porte sa signature. Elle qui ne savait ni lire ni écrire s’est efforcée à signer un document officiel. Emouvant.
Fanny : Tu l’as trouvé où ?
Ludovic : Aux archives nationales. Un moment d’une incroyable intensité
Fanny : La découverte d’un trésor pour toi donc
Ludovic : Qui vaut tout l’or du monde. Quand je disais hier que parfois je me sentais guidé !
Fanny : On ressent que tu adores cette partie de ton travail, les recherches
Ludovic : J’adore ça oui. Chercher, trouver des documents inédits. Remonter le fil du temps. On m’a surnommé le Columbo des archives.
Fanny : J’allais dire l’Indiana Jones des archives.
Ludovic : Je prends aussi J’adore ces films
Fanny : C’est donc indispensable que tu puisses mettre un jour un visage sur Rosalie.
Ludovic : Pas tant que ça. Pour moi, c’est surtout sa vie et ses actions qui comptent, mais ce serait incroyable si je trouvais ce portrait.
Fanny : As-tu pensé à faire ton arbre généalogique ? Et si vous aviez un ancêtre commun ?
Ludovic : J’adore l’idée. A vrai dire, je n’ai pas eu le temps de faire mon arbre. C’est incroyable vu le temps que je passe sur celui de mes héros. Mais je ne pense pas que nous ayons des ancêtres communs elle et moi. Elle était picarde, moi du Nord de la France. Les familles étaient plutôt sédentaires à l’époque.
Par contre, j’ai rencontré une dame qui pense être de la même famille. Deux dames même. Elles ont pris contact avec moi
Fanny : Racontes nous !
Ludovic : La première est venue me voir au salon du livre d’Aumale. Elle m’a dit que sa mère portait le même nom que Rosalie. Elle était picarde elle aussi. J’ai cherché, mais c’est une branche éloignée.
Fanny : Et la deuxième ?
Ludovic : La deuxième m’a donné rendez-vous dans un restaurant à Paris. Elle m’a donné la copie du fruit de ses recherches. J’ai creusé un peu plus, là aussi, une branche éloignée, plus éloignée encore que la première. Maïs oui, elles ont des ancêtres communs
C’est ça qui est dingue avec les livres.
Fanny : C’est un aspect vraiment intéressant de ton travail
Ludovic : Ils nous font vivre des choses incroyables à nous, auteurs. Des choses que l’on n’imaginait même pas
Fanny : Oui car même si elle appartient au passé, tu as tissé un lien avec le présent.
Ludovic : Je me suis aperçu que le destin de Rosalie a touché des tas de lecteurs. Je ne m’y attendais pas. C’est probablement le livre dont on me parle le plus. Peut-être aussi parce que les lecteurs ont ressenti l’amour que j’avais pour cette femme
Fanny : Comme quoi, cet historien avait tout faux.
Ludovic : Oh que oui !!!
Fanny : Tu m’as donné envie de le lire en tout cas !!
Ludovic : Il faudra attendre octobre. Merci beaucoup
Fanny : Même si à la base ce n’est pas ma came.
Ludovic : Tu sais, le plus beau compliment que l’on m’ait fait un jour sur un salon, fut quand un lecteur est venu me trouver, m’a dit que sa femme avait acheté Rosalie et que, par curiosité il l’avait lu. Il m’a dit que, grâce à ce bouquin, il avait appris à aimer l’histoire. Depuis, il lit tout ce que je sors.
Fanny : En effet, c’est un très beau compliment !
Ludovic : C’est probablement l’un des plus beaux moments de salon
Fanny : De quoi te conforter dans ton écriture et tes projets
Ludovic : Absolument ! Car je doute toujours. Je me remets toujours en question, ne prends jamais rien pour acquis
Fanny : Par rapport à ton travail ? d’auteur je veux dire ?
Ludovic : Oui, mais pas seulement. Ça me bouffe peut-être un peu trop la vie ! Je suis quelqu’un qui n’est pas sûr de lui. Pas du tout.
Quand j’ai écrit La Belle de Caux, je ne voulais même pas le publier. C’est l’un de mes éditeurs qui m’a supplié presque de le lui envoyer
Fanny : Justement comment fonctionnes-tu lorsque tu écris ? As-tu un rituel ? un lieu en particulier ?
Ludovic : Non, pas de rituel. Ça se passe presque toujours assis à mon bureau. Avec de la musique … Parfois oui, parfois non, ça dépend. En tout cas, si musique il y a, ce n’est jamais en français, car les mots que j’entends viennent perturber mon écriture
Fanny : Quelles styles de musique ?
Ludovic : de tout : rock, pop, classique. Je suis assez éclectique : du blues, jazz. Vraiment de tout, ça dépend de mon humeur
Fanny : Des noms en particulier ?
Ludovic : George Michael, Aretha Franklin, Imagine dragons, ACDC, Madonna, Marvin Gaye, Sinatra. Vraiment de tout. La BOF de Game of Thrones ou de The Crown.
Fanny : Oui en effet.
Ludovic : En ce moment, j’écoute du Moby en vous répondant.
Fanny : J’adore Moby !
Pendant l’écriture, as-tu besoin de l’avis de tes proches ?
Ludovic : Oui, comme je doute, il me faut au moins un avis. Comme la personne qui partage ma vie lit très peu, elle me dit déjà si elle accroche ou non. Puis, ensuite, chapitre par chapitre, elle fait la chasse aux répétitions. Si j’arrive à susciter de l’intérêt chez elle qui n’aime pas trop lire et aime encore moins l’histoire, je sais que je suis sur la bonne voie.
On se connaît suffisamment pour ne pas prendre de pincettes.
Fanny : C’est chouette comme collaboration.
Ludovic : Et puis, j’ai noué une véritable amitié avec la correctrice de ma maison d’éditions. Son avis compte beaucoup aussi
Fanny : Donc elles te rassurent…
Ludovic : Ou pas… Parfois je reprends ce que j’avais écrit après avoir entendu leur avis. Mais oui, elles me rassurent sur le chemin à prendre
Fanny : C’est certain, donc tu avoues avoir pas mal de complices !! On note !!!!
Ludovic : Mince ! J’aurais dû me taire.
Fanny : Trop tard !!!
Fanny : Revenons à La Belle de Caux, pourquoi n’envisageais-tu pas une publication ?
Ludovic : J’ai commencé à écrire ce livre peu avant le confinement. Je venais de vivre un coup dur avec ma précédente maison d’édition. Cette bataille m’avait profondément affecté. Je n’avais plus envie d’écrire pour ne plus jamais avoir à revivre tout ça. Je ne savais même pas, si je pourrais réécrire un jour.
Je me suis dit que j’allais essayer avec cette histoire. Puis le confinement est arrivé. Je ne pouvais pas me rendre aux archives, mais j’avais déjà recueilli des témoignages et avais un peu de documentation.
Alors, je me suis mis au boulot. Je l’ai écrit en 6 mois
Fanny : Ah oui quand même !
Ludovic : Mais ce bouquin était très différent de ce que j’avais fait jusqu’à présent. Le doute était puissance 1000. Et je ne savais pas si la plume était intacte ou non. Le manuscrit a dormi dans mon ordinateur. Puis Salvatore de chez IFS m’a demandé après avoir édité le dernier tome de ma trilogie sur Sade si j’avais autre chose.
Fanny : Nous allons donc procéder à sa saisie pour y vérifier tout cela !
Ludovic : Je lui ai dit que oui, mais que ça ne rentrait pas dans leur ligne éditoriale. Il m’a demandé de le lui envoyer quand même et voilà !
Ce livre est un OLNI … un objet littéraire non identifié
Fanny : Donc une belle aventure de plus !
Ludovic : Oui ! et une belle aventure si j’en crois tout ce qui se passe autour de cette Belle de Caux. On verra
Fanny : Et que se passe-t-il ?
Ludovic : Mais il semble qu’elle me réserve de belles surprises. Les retours sont incroyables. Mes éditeurs m’ont annoncé la proposer pour un prix prestigieux, mais je ne peux pas en dire plus pour le moment et puis, il faut voir si la Belle sera retenue
Fanny : Mais c’est super ça ! Je te le souhaite en tout cas !
Ludovic : Merci beaucoup.
Fanny : Et donc côté retour des lecteurs ?
Ludovic : Certains m’ont dit avoir pris une véritable claque, d’autres avoir terminé le livre en pleurs. Et les compliments sur ma plume me font chaud au cœur. Je crois que, de tous, c’est celui pour lequel on parle ainsi de ma plume. Comme quoi, écrire sans pression peut être salvateur, même si on doute.
Fanny : Pour toi en tout cas oui.
Ludovic : Non, mais je me suis rendu compte que je pouvais écrire rapidement si je suis dégagé des contraintes professionnelles.
Fanny : Ne vas quand même pas provoquer un autre confinement !
Ludovic : Non. La plupart sont des lecteurs qui me découvrent avec La Belle de Caux. Peut-être qu’ils étaient un peu tièdes pour lire mes autres livres plus « historiques ». En tout cas, ils ont envie de lire d’autres de mes livres du coup.
Oui, cette Belle de Caux est née dans un contexte particulier et me fait vivre des choses particulières
Fanny : Ce sont de belles histoires en tout cas.
Ludovic : Oui. La vie d’auteur est pleine de surprises
Fanny : Tu nous dis donc que La Belle de Caux est différent par rapport aux autres livres. As-tu envie ou envisages-tu un jour quelque chose d’encore plus différent ?
Ludovic : Oui. Cela plusieurs années que des amis auteurs me demandent d’écrire un polar, pur et dur. J’ai des envies aussi de ce côté-là. J’ai des idées, dont une qui est presque aboutie. Je pense l’écrire en parallèle d’un autre bouquin. Peut-être dans un ou deux ans.
Et puis, j’ai un projet purement historique cette fois. Quelque chose comme un essai.
J’accumule des documents en ce sens depuis 20 ans. Je pense m’y atteler en 2023, mais ce sera un travail de longue haleine
Fanny : 20 ans de trafic ???? C’est clair que je ne te libérerai pas !!!!
Ludovic : Quand on aime…
Fanny : Qui sont ces amis auteurs ? Avoue !!!!!
Ludovic : Mais les fournisseurs sont aussi en cause.
La première à m’avoir encouragé en ce sens fut Gaelle Perrin. Puis d’autres se sont greffés au fil des ans. Gaelle avait lu une nouvelle que j’avais écrite. Un truc noir. Elle m’avait dit que je devais en faire quelque chose. Maïs, il me faut du temps. Je ne suis pas un homme facile
Fanny : Pourquoi du temps ? Tu nous dis que l’idée est presque aboutie. Pour te lancer ?
Ludovic : Oui, pour faire le grand saut. Quand je disais que j’étais plein de doutes, je ne mentais pas
Fanny : De toute façon si tu veux sortir, il vaut mieux dire la vérité !
Ludovic : Je suis long à prendre une décision, mais quand elle est prise, rien ni personne ne peut me faire faire machine arrière.
Fanny : Peux-tu nous en dire plus sur ce projet historique ?
Ludovic : Disons que c’est assez noir. Cela tournera autour d’une célébrité connue de tous. Elle sera là en arrière-plan. J’y mêlerai des éléments de réflexion sur notre société actuelle, sur la téléréalité, le paraître, le besoin viscéral pour certains à accéder à une notoriété coûte que coûte. Il y aura du sang, des meurtres
Fanny : On adore ça !
Ludovic : Mais des références au passé. Je ne peux pas m’en empêcher
Fanny : Oui donc je comprends pourquoi cela te prendra beaucoup de travail.
Si c’est Geneviève que tu as choisie comme célébrité, tu peux nous le dire, on le gardera pour nous.
Ludovic : Si je le dis, elle ne me laissera plus sortir d’ici. Elle nous a à l’œil
Fanny : Surtout toi !
Ge : oui je vous surveille tous les deux !
Fanny : En tout cas Ludovic c’est bien que tu aies réécrit après ce qui est arrivé, cela aurait été dommage de tout arrêter.
Ludovic : Oui, mais j’étais vraiment au bout du rouleau. Mais quand je vois ce que je vis maintenant, oui, cela aurait été dommage
Fanny : Par rapport aux éléments que tu collectes, documents ou photos, comment les stockes-tu ? En version papier ? Numérique ?
Ludovic : D’abord numériquement sur un disque dur. Mais je suis accroc au papier. Je trouve que c’est plus simple à travailler. En tout cas pour moi. Alors j’imprime certains trucs, pas tout, mais une partie oui. Je ne peux pas me passer du papier, de tourner les pages, d’annoter
Fanny : Tu as une pièce dédiée à cela ?
Ludovic : Mon bureau. C’est mon antre. Je suis avec mon ordi, entouré de mes livres avec une vue sur mon jardin. Je ne peux rêver mieux comme endroit pour travailler
Fanny : Le top quoi
Ludovic : La campagne normande est très belle et reposante. Je vois les oiseaux, les animaux sauvages qui traversent parfois le champ d’en face
Fanny : Avec un chat qui vient se coucher sur les livres ?
Ludovic : Oui, ou sur mon imprimante …Je vois que vous avez enquêté.
Fanny : Bien sûr !!! Nous avons des espions partout !
Ludovic : Le chat noir c’était Mystic. Elle nous a quitté il y a 2 ans. Elle avait 18 ans.
Depuis, on a le petit Winston. Un clown à 4 pattes. Il a tendance à me réveiller tous les matins vers 4h, mais bon, je l’aime
Des questions des réponses intéressantes, et un auteur qui aime les chats, c’est bien aussi
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C’est même très bien Marie-Christine 🙂
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