Suite de la Garde à vue de Monsieur Ludovic Miserole
2e interrogatoire par Aline Gorzack
La GAV, Garde à vue d’un auteur par Collectif polar c’est : 4 interviews d’un même auteur par 4 flingueuses différentes.
La GAV c’est des interviews en direct, du vrai live, en conditions réelles.
GAV Ludo – séquence 2
Miss Aline : y’a personne ici ! Où est le prévenu ? Monsieur Ludovic Miserole ?
Dany : il digère son cassoulet !
Ludovic : Non je suis là. Même si le cassoulet me reste un peu sur l’estomac
Miss Aline : Ah…. On va pouvoir commencer ….
Pourquoi vous écrivez ? Qu’est-ce que l’écriture vous apporte ou comble ?
Ludovic : L’écriture est un besoin. Quelque chose qui me titillait déjà quand j’étais en primaire. Tout comme la lecture, l’écriture était pour moi un moyen de m’évader. Au fil du temps, écrire est devenu une évidence. Quelque chose de vital. Sans l’écriture, il manquerait quelque chose à mon équilibre. J’ai besoin de cette part d’imaginaire pour accepter la réalité. Puis j’adore découvrir et faire découvrir des personnages inconnus. Je suis un passeur d’histoires, de leur histoire.
Miss Aline : oula… minute papillon…. Vous vous sentez donc équilibré un pied dans la réalité l’autre dans l’imaginaire ! Vous avez besoin de l’imaginaire pour « supporter » la réalité ?
Ludovic : Même quand je n’écris pas, je pense sans cesse aux projets à venir. A celui en cours.
Miss Aline : quelle réalité ? qui ou quoi d’insupportable ?
Ludovic : C’est ça. La réalité est trop pesante. L’imaginaire aide à supporter l’insupportable. Mon cerveau marche à plein tout le temps.
Il n’y a qu’à allumer la télé, lire la presse. Ce monde devient fou. Puis écrire, c’est aussi un moyen de panser ses blessures. Ecrire est un exercice solitaire qui aide à l’introspection
Miss Aline : L’introspection on la trouve partout même dans cette GAV !
Ludovic : J’en ai eu la preuve ce matin même
Miss Aline : Le monde est fou pour tout un chacun et tout un chacun n’écrit pas. C’est à mon sens plus un « besoin » personnel, non ?
Ludovic : On me demandait ce que m’apportait l’écriture ? Pour moi, elle apporte tout ça
Miss Aline : le besoin d’écrire est quotidien ? ou plutôt par vague ou n’importe quand ?
Ludovic : quotidien, même si je n’en ai pas toujours l’occasion. Quand je ne peux pas écrire, les personnages et l’histoire continuent de murir dans ma tête. Quand une phrase arrive, j’essaies de la noter dans mon téléphone ou sur un bout de papier si je suis au boulot. On apprend vite à s’adapter
Miss Aline : vous avez une passion pour l’Histoire avec un grand H … d’où vous vient-elle ?
Ludovic : Je crois l’avoir toujours eue. Elle s’est développée au fil du temps, au fil de mes lectures aussi. Puis, j’ai eu la chance d’avoir un professeur d’histoire au Lycée qui nous racontait l’Histoire par des anecdotes, souvent très drôles d’ailleurs. Avec lui, l’Histoire n’était pas ennuyeuse. Les rois étaient des hommes bien réels et pas des portraits figés dans un musée. Il nous racontait l’histoire comme s’il nous racontait des histoires. J’ai adoré ses cours. Ils n’ont fait qu’accentuer mon goût pour l’Histoire. J’essaie toujours, depuis, de l’aborder ainsi. En m’efforçant de donner vie à ces figures du passé, à les ancrer dans le quotidien. Puis je crois que pour comprendre le présent, il faut une certaine connaissance aussi du passé.
Miss Aline : Vous mettez en avant dans vos romans « les gens de peu » pourquoi précisément ces « petites gens » ?
Ludovic : Justement parce qu’on ne s’y intéresse pas. On ne compte plus les livres sur Marie-Antoinette ou la Dubarry, mais on ne raconte jamais l’histoire de celles et ceux qui, issus du peuple, étaient là aussi, à la même époque. Je pense qu’il est plus facile de s’identifier à eux plutôt qu’à une reine ou un duc. Pour moi, chaque vie est importante et mérite qu’on s’y attarde. Je ne me voyais pas raconter pour la énième fois la vie de Marie-Antoinette ou de Sade. D’autres l’ont fait bien avant moi et certainement mieux que je ne l’aurais fait. Autant avoir une approche différente et surtout qui me plaise.
Miss Aline : je suis d’accord sur l’approche différente mais pourquoi eux précisément, ils n’étaient surement pas les seuls « petits » autour des « grands » ?
Ludovic : Le premier roman est parti d’une rencontre au détour d’un livre. Je lisais une biographie de Marie-Antoinette et je suis tombé sur Rosalie Lamorlière. Une servante de prison. Un témoin privilégié des derniers jours de cette reine avant sa montée à l’échafaud. Une fille de cordonnier qui a raconté plus tard les 76 jours de Marie-Antoinette à la Conciergerie. Un témoignage sur lequel tous les historiens se sont basés depuis plus de 200 ans. Pourtant, de cette fille on ne savait rien. Cette fille m’avait ému et je voulais en savoir davantage sur elle. Tout est parti d’un sentiment de frustration. Je ne comprenais pas que personne ne soit intéressé à elle, à ce témoin privilégié de l’Histoire. Un historien du 19ème a même écrit qu’il ne servait à rien de s’intéresser à elle car « la pauvre fille n’a pas d’histoire ». J’ai trouvé ça cruel. Alors j’ai commencé à chercher, pour moi, pas pour écrire.
Et puis, de fil en aiguille… L’envie d’écrire ne m’avait pas quitté depuis l’adolescence. Je me suis jeté à l’eau.
Miss Aline : oui c’est cruel d’autant que sans ces personnes de peu, les grands sont « perdus »...
Ludovic : Je suis entièrement d’accord. Il me fallait remédier à cela. Sortir Rosalie de l’oubli. En plus, beaucoup la connaisse sans même le savoir. Vous connaissez le manga Lady Oscar ?
Miss Aline : ah oui j’adooooore !
Ludovic : Rosalie en est un des personnages. Il n’y a rien d’historique dans ce qu’ils en disent, mais elle y apparait. Je m’en suis souvenu au fil de mes recherches
Miss Aline : ah il faut que je le regarde à nouveau…
Ludovic : Je me devais de raconter sa véritable histoire
Dany : oui
Ludovic : C’est elle
dans le Manga
Miss Aline : ah oui je me souviens d’elle.
Ludovic : Il m’aura fallu 10 ans de recherches et d’écriture pour raconter la vie de cette domestique qui ne savait ni lire ni écrire. Retrouver sa trace dans les registres, dans les archives. Je n’y connaissais rien, mais la passion fait déplacer des montagnes. J’espère lui avoir rendu justice
Miss Aline : justement ça commence comment et où ces recherches ?
Ludovic : La seule chose que je savais c’est qu’elle était née à Breteuil, en Picardie et qu’elle avait été employée à la Conciergerie du temps de la révolution. Je me suis rendu à Breteuil, à la mairie. J’ai commencé à rechercher sa trace dans les registres de baptême. J’ai découvert peu à peu sa famille. Puis je suis allé aux archives nationales, à celles de la police et de l’assistance publique car j’avais découvert qu’elle avait terminé sa vie dans un hospice. Et j’ai eu la chance de tomber, par hasard, sur la tombe de sa fille au père Lachaise. J’ignorais alors qu’elle avait eu une descendance. Le hasard ou le destin, je ne sais pas
Miss Aline : 10 ans de recherches c’est de la passion certes mais aussi de l’obsession, non ?
Ludovic : Ha haha ! Oui, peut-être. J’avais tellement à cœur de raconter la vie de Rosalie et de démontrer que Lenôtre avait tort, que chacun possède une histoire. Le pire, c’est que si cet historien avait été un peu plus curieux, il aurait pu interroger la fille de Rosalie. Elle vivait encore à l’époque. Un gâchis !
Miss Aline : il ne pouvait être curieux vu qu’il l’a considérée « sans histoire ».
Ludovic : A trop être catégorique, on manque des choses importantes. On passe même à côté de l’essentiel parfois. Surtout que cet homme a écrit un livre sur la captivité de Marie-Antoinette
Miss Aline : il faut croire que Rosalie vous attendait… destin, hasard !
Ludovic : C’est bizarre, mais tout au long de ces recherches, quand il m’arrivait de me décourager, je trouvais toujours un document, un truc qui me faisait rebondir.
J’ai cru, et je crois encore que Rosalie m’a accompagné durant ce travail.
Miss Aline : très certainement…
Ludovic : Je dis d’ailleurs souvent, qu’après ma mère, Rosalie est la femme la plus importante de ma vie. Il m’arrive encore de trouver des choses lorsque je me rends aux archives.
Miss Aline : elle a vécu 10 ans avec vous… c’est pas rien….
Ludovic : Elle reviendra dans mes œuvres, d’une manière ou d’une autre. Lorsque j’ai écrit la scène dans laquelle elle meurt, ce fut très difficile
Miss Aline : Elle est imprégnée en vous alors surement qu’elle reviendra.
Ludovic : C’était comme si, je la faisais mourir une deuxième fois
Miss Aline : elle mourra autant de fois qu’un lecteur fermera votre livre…. Mais elle aura (re)vécu tout autant de fois. Elle ne sera plus oubliée
Ludovic : Merci pour elle.
Miss Aline : quelle étrange GAV….
Ludovic : En effet
Dany : Oui je trouve que c’est beau ce que vous écrivez tous les deux …
Ge : Je confirme, en effet
Miss Aline : ils se sont bien trouvé ces deux-là, @Danièle Ortega-Chevalier. Elle pour sa soif/reconnaissance d’existence. Lui pour faire vivre sa passion et l’ancrer en lui viscéralement. Ce qui nous donne à nous lecteurs, l’envie d’aller lire Rosalie et regarder à nouveau Lady Oscar.
Ludovic : J’ai l’intégrale à la maison . Rosalie ressortira en octobre
Miss Aline : oh trop la classe !!
Ludovic : en même temps que Zamor, le nègre républicain
Miss Aline : yes actualité à suivre !
Ge : Ah trop bien, nos lecteurs et lectrices vont pouvoir enfin retrouvé ses deux héros méconnus !
Ludovic : Mes deux premiers romans seront ENFIN réédités
Miss Aline : votre actualité justement … vous êtes sur un nouveau projet/sujet ?
Ludovic : Mon dernier livre, La Belle de Caux, est sorti le 14 juin dernier. Je travaille actuellement sur mon septième roman. Toujours sur un personnage méconnu de l’histoire. Encore une fois, je me suis rendu sur ses traces : lieux de naissance, j’ai retrouvé sa maison, celle où mon personnage principal a rendu son dernier souffle. Je vais pouvoir m’y remettre, car la promo de La Belle de Caux a été assez intense.
Mais j’avoue que La Belle de Caux m’a fait du bien. C’était la première fois où j’écrivais un livre sans me rendre aux archives. Même s’il y a une part historique, le travail était beaucoup moins intense que d’habitude
Elle se sait condamnée, victime, comme tant d’autres, de la cruauté des hommes.
Ce soir, la belle d’antan vit ses dernières heures. Incapable de bouger, et encore moins d’appeler à l’aide, elle les entend, à la porte, discuter de la façon dont Ils vont se débarrasser d’elle.
Résignée, elle n’a d’autre choix que de se préparer à l’inévitable en se remémorant les jours heureux partagés avec Maupassant, Massenet, Monet et tant d’autres, ces fantômes d’une gloire révolue.
Et si de son histoire dépendait justement son salut.
Et si…
Depuis des années, Ludovic Miserole prend plaisir à raconter le destin de gens ordinaires ayant vécu des choses extraordinaires. Avec La Belle de Caux, l’auteur de la trilogie des Crimes du marquis de Sade ne déroge pas à cette règle qu’il s’est fixée.
Embarquez dans cette nouvelle histoire dans laquelle le devoir de mémoire se fait ressentir à chaque page.
Un auteur que je découvre,maiis qui attire mon intérêt, il semble plein d’imagination !
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Un auteur super sensible aussi ! moi j’adore !
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Je vais remonter son petit dernier très haut dans ma PAL !
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Oh trop chouette ça ma Nath !
Vive l’effet GAV
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