J’étais un autre et vous ne le saviez pas d’Olivier Mas alias Beryl 614 paru le 5 mai 2021 aux éditions de l’Observation dans la collection Humensis ; 19€ ; 256 pages ; 14x 21cm.

Les missives de Fanny H

J’étais un autre et vous ne le saviez pas

J’étais un autre et vous ne le saviez pas est écrit en quatre parties divisées en plusieurs petits chapitres : 1) Les défis de la clandestinité, 2) Avant l’infiltration, 3) La conduite de l’action clandestine, 4) Le dénouement, avec un point absolument nécessaire sur l’historique et l’origine des premiers espionnages. L’ancien nom de la DGSE est SDECE (Service de Documentation Extérieure et de Contre-Espionnage).

J’ai découvert Olivier Mas avec un article dans la revue Alibi et de suite son parcours m’a intrigué. Je suis ravie de l’avoir rencontré au salon de PolarLens où j’ai pu enfin mettre un visage sur cet ex-espion. Je suivais déjà ses vidéos sur Talks with a spy où on ne le voyait que jusqu’aux épaules. Olivier Mas a rejoint la DGSE (Direction Générale de la Sécurité Extérieure) au début des années 2000. 

Dans J‘étais un espion et vous ne le saviez pas, il a choisi de nous présenter l’expérience professionnelle et personnelle, sous cinq portraits différents, de deux agents de la Résistance, un illégal russe, un espion du Mossad et un agent américain du service des douanes. L’auteur revient également sur des moments de sa vie d’espion et celles de héros du passé comme le colonel Rémy, de son vrai nom Gilbert Renault, l’un des résistants français les plus connus durant la Seconde Guerre mondiale ou Jeanne Bohec, surnommée la plastiqueuse à bicyclette.

Beryl 614 se confie en nous livrant cette peur quotidienne : celle de se faire démasquer. Il nous explique qu’il est extrêmement difficile, par exemple, de gommer certaines choses comme la position naturelle du corps ou la gestuelle, d’où l’importance d’effectuer un travail minutieux. Pourtant, vivre continuellement tenu au secret, certains le réussissent très bien pendant de nombreuses années comme Rudolf Ivanovitch Abel, un physique de monsieur tout le monde, membre du KGB, ayant la double nationalité car né en Grande-Bretagne de parents russes. Nous pouvons lire également des anecdotes sur Pablo Escobar ou Saddam Hussein. Balzac et Hugo sont également cités.

L’auteur nous parle beaucoup de la santé mentale de l’espion et surtout de comment ne pas sombrer lorsque l’on vit plusieurs vies dans une vie. Je pense que le rôle du conjoint ou de la conjointe est absolument essentiel pour maintenir un équilibre. Il nous apprend qu’en cas d’ infiltration, c’est un plus d’avoir un contact connaissant déjà le milieu afin de garder un repère, un phare dans la nuit. Comme cela doit être éprouvant parfois. Nous apprenons qu’en cas de guerre, tous les coups sont permis car le but ultime est de réussir la mission, obtenir des réponses coûte que coûte.

Il faut être attentif à cette lecture. Pour ma part, j’aurai préféré l’histoire d’un espion à la fois plutôt que de revenir à chaque fois sur une partie de la vie de l’ un ou de l’autre. Néanmoins, Olivier Mas a su rendre son récit professionnel très intéressant, animé d’une écriture dynamique, rythmée et avec un vocabulaire accessible à tous. C’est une vie exaltante, certes, mais douloureuse et qui nécessite de nombreux sacrifices. Nous sommes en réalité très loin de James Bond. C’est un métier cadré et structuré avec énormément de règles. Beryl 614 nous offre un regard éclairé et avisé sur le monde de l’espionnage. Si ce sujet vous intéresse ou si vous êtes tout simplement curieux envers ce milieu, vous passerez un très bon moment de lecture.