Sanction, Ferdinand von Schirach

Le livre : Sanction de Ferdinand von Schirach ; traduit de l’allemand par Rose Labourie. Paru le 6 février 2020 chez Gallimard dans la collection  « Du monde entier »  16€. (169 p.) ; 21 x 14 cm Réédité en poche le 10 novembre 2022 chez Folio, 7€20.

4e de couv :

Sanction

Une jurée d’assises qui influence malgré elle l’issue d’un procès, un groupe d’enfants qui s’acharne sur un vieil homme isolé, un homme dont la poupée gonflable est attaquée, une jeune avocate qui doit défendre le chef d’un réseau de prostitution…

Dans ces douze nouvelles appartenant à l’univers de la justice, la plume incisive de Ferdinand von Schirach saisit des existences banales à l’instant précis où elles basculent, et interroge la part sombre qui sommeille en chacun de nous.

L’auteur : Né à Munich , le 12 mai 1964, Ferdinand von Schirach est est juriste, dramaturge et écrivain. Il avocat de la défense au barreau de Berlin depuis 1994. Ses deux recueils de nouvelles, ‘Crimes’ et ‘Coupables’, suivis de son roman très remarqué, L’affaire Collini, ainsi qu’un roman policier, Tabou, tous publiés par les Éditions Gallimard, lui ont valu un succès international.
En mars 2020, il publie ‘Sanctions’, le dernier recueil de nouvelles de sa trilogie.

 

Extraits : 
 » Le courrier du tribunal de grande instance était imprimé sur papier recyclé. Il disait qu’elle avait été désignée comme jurée pour cinq ans, Elle composa le numéro de l’en-tête et dit qu’il y avait un malentendu, elle n’avait pas le temps pour ça. L’homme au téléphone était las. Elle pouvait tenter de se faire dispenser, répondit-il, et à sa voix c’était loin d’être la première fois qu’il prononçait ces mots. Il était possible de refuser la charge à condition d’être membre du conseil fédéral ou du parlement régional, national ou européen. Ou encore d’être médecin ou infirmier. Tout était dans la loi sur le système judiciaire, c’était à elle d’aller voir. Si, après ça, elle pensait toujours avoir un motif valable, libre à elle de rédiger une lettre, le tribunal statuerait sur sa demande après consultation du parquet.
Katharina interrogea l’avocat de la société d’informatique. Il lui dit qu’elle n’avait aucune chance. »
« Désormais, quand elle n’avait pas cours, elle allait au tribunal de grande instance assister aux audiences. Un jour, elle y vit un avocat d’un certain âge, son client était accusé de fraude fiscale. Lors d’une perquisition, un paquet de viagra et un gode ceinture avaient été trouvés dans son coffre-fort. Au cours du procès, un policier plaisanta sur le sujet. Le vieil avocat leva les yeux de son dossier : « Vous trouvez ça correct de prendre de haut les faiblesses des autres ? » demanda-t-il. Ce n’était qu’une phrase, prononcée tout bas, d’une voix presque blanche, une phrase qui n’avait rien à voir avec la procédure judiciaire ni avec la culpabilité du client. Mais dans la salle d’audience, le silence se fit, et Seyma pensa à sa propre vie. Cinq ans plus tard, elle envoya sa candidature à cet avocat. »
« Il vivait de petites affaires, conflits de voisinage, rixes de bar et trafics de drogue – ses clients étaient des dealers de rue avec des sachets d’héroïne dans la bouche qu’ils avalaient quand ils avaient la police aux trousses. Il passait ses soirées dans un restaurant chinois malfamé. Tous les soirs, il allait s’asseoir dans l’arrière-salle pour jouer aux cartes. Autrefois, il avait défendu des joueurs compulsifs, des gens nerveux, hypersensibles, qui refusaient de devenir adultes. À présent, il comprenait pourquoi ils se sentaient en sécurité à la table de jeu. Ici, les règles étaient simples et claires, et tant que la partie durait, il n’y avait que cette salle et les cartes, le reste du monde n’existait pas. »

Le post-it de Ge

Sanction, Ferdinand von Schirach

 

Alors que je parlais avec un de mes lecteurs de mon challenge « Feuilles allemandes », celui-ci m’interpelle et me dis :

 – J’espère que vous avez choisi Ferdinand von Schirach dans votre sélection, c’est vous qui me l’avez conseillé et je me suis régalé.

Et moi de me dire : « punaise mais c’est vrai, pourquoi m’y ai-je pas pensé ?

Peut-être parce que sur le coup je n’avais pas sous la main dans ma bibliothèque personnelle un titre de von Schirach que je n’avais pas lu.

Oui mais voilà, j’ai une autre bibliothèque à ma disposition, une bien plus grande, j’y travail même. Et c’est comme cela que je me suis retrouver avec Sanction de Ferdinand von Schirach conseillé cette fois par mon lecteur, c’est le monde à l’envers !

Alors que nous raconte « Sanction« 

Ferdinand von Schirach nous propose là un court recueil de nouvelles. Douze pour être précise. Douze textes qui nous entrainent dans l’univers de la justice. Il  nous plonge dans
les coulisses des affaires pénales. Avec lui on saisit parfaitement l’instant où pour chacun d’eutre nous tout peut basculer, quand un individu lamba comme vous et moi peut passer du coté obscure. Quand un l’équilibre fragile s’effondre, d’un fait ordinaire devient quelque chose d’extraordinaire. Quand l’humain est confronté à l’inhumain.  Quand la justice elle-même dérape. Quand l’institution judiciaire elle aussi bégaie.  Car la justice, forcément est rendu par de homme et des femmes, eux aussi friables !

Ferdinand von Schirach est avocat de la défense au barreau de Berlin depuis 1994. J’avais déjà lu ses deux recueils de nouvelles, Crimes et Coupables, ainsi que ses romans L’affaire Collini  qui ouvrait le débat sur la prescription des crimes nazis et Tabou, je connais déjà la puissance d’évocation de notre auteur allemand. J’ai à nouveau apprécié son son style concis Et, ici, une nouvelle fois je n’ai pas été déçue.

L’écriture au scalpel de l’écrivain allemand nous plonge au cœur de la mécanique des affaires criminelles et de la psychologie de ceux qui la rendent.  Il bouscule, il interroge… Pourquoi des innocents vont condamnés, des coupables remis en liberté ? … Avec Sanction il sonde cette dimension humaine de la justice. Ses erreurs, ses lâchetés peut-être, les crimes impunis, les verdicts  approximatifs voire imparfaits

Il nous donne à voir, avec une prose glaçante, une vision singulière de ce que peut-aussi être la justice. Et croyez-moi cela ne vous laissera pas indemne !

Et tiens, tant que j’y pense, il serait bien que je vous parle aussi des autres titres de Ferdinand von Schirach. Car vraiment si vous ne connaissait pas cet auteur, foncez !!!

 

Autres extraits
 » Katharina avait grandi en Haute Forêt-Noire. Onze fermes à 1 100 mètres d’altitude, une chapelle, une épicerie ouverte uniquement le lundi. Ils habitaient le dernier bâtiment, une ferme sur trois étages avec un toit bas. C’était la maison des parents de sa mère. Derrière la ferme, il y avait la forêt, et derrière, les rochers, et derrière, encore la forêt. Elle était la seule enfant du village. (…) »
« Le soir venu, il se leva, s’installa au bureau et essaya de lire le dossier. Les lettres dansaient sous ses yeux. Schlesinger savait qu’une vie pouvait basculer en un rien de temps. »
« On leva le mandat de dépôt contre l’accusé, il fut libéré. Quatre mois plus tard, il frappa sa femme à la tête avec un marteau, elle mourut sur le trajet de l’hôpital. »
« La défense pénale, disait-il, c’est le combat de David contre Goliath. »

Livre lu dans la cadre de 4 défis littéraires

 – Le Pumpkin Autumn Challenge 2022 chez Guimause

– Challenge Thriller et polar 2022- 2023 chez Sharon

 – Challenge « Le tour du monde en 80 livres » chez Bidb (Allemagne).

 Les feuilles allemandes 2022

 

16 réflexions sur “Sanction, Ferdinand von Schirach

  1. Ah, je suis très contente de voir von Schirach chroniqué ! Je rôde autour de lui depuis quelques semaines, j’ai très envie d’acheter son dernier livre ! Patrice a lu l’Affaire Collini et il a beaucoup aimé aussi… Parfois c’est le mot « nouvelles » qui me freine.

    Merci beaucoup pour ta participation Geneviève ! 🙂

    Aimé par 1 personne

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