Exquis Cadavre exquis saison 2
Un pacte sinon rien, la récap. livre 6
Allez pour vous qui avez loupé un chapitre, voici le sixième récapitulatif des derniers épisodes de notre nouveau cadavre exquis
L’idée avait le mérite d’être simple : liquider son auteur-vedette pour transformer en best seller son dernier manuscrit totalement délirant.
Geneviève V. n’avait plus qu’à trouver le bon tueur. Mais à jouer avec le feu on risque de se cramer les doigts, et tout le reste. L’éditrice n’avait pas prévu de croiser la route de son ancien tortionnaire ni de réveiller le Jaguar. Dans l’ombre un concurrent sadique attend son heure…
Ici retrouvez la première récap, livre 1 les 8 premiers chapitres.
Et là la deuxième, livre 2 chapitres 9 à 18
Ici la troisième, livre 3 chapitre 19 à 31
la quatrième, livre 4 chapitre 32 à 48
Et le livre 5 de 49 à 60 ICI
Que les épisodes commencent !
Exquis Cadavre exquis Saison 2 Episode 61
par Caroline Noël
Quand le fruit est mûr, il se détache
Caroline Noel
« Si dans une heure je ne suis pas de retour, rentre seule. Je me ferai raccompagner à mon hôtel. Ne sois pas inquiète pour moi, mon chou », lui avait dit Geneviève.
Vexée, mais néanmoins maître de ses émotions, Noémie n’avait rien laissé paraître. Obéissante par principe, elle était retournée à la voiture.
13 h 12
Seule avec ses pensées, la jeune femme a eu le temps de réfléchir. Elle a toujours eu cette capacité à « voir » les choses. Mieux, à les ressentir. Certains parlent d’un 6ème sens typiquement féminin. Noémie croit plutôt qu’elle a un don. Lorsqu’elle se concentre bien, des flashs lui viennent en flèche et des connections invisibles à l’œil nu lui apparaissent dans une logique implacable.
13 h 27… 13 h 42… 13 h 59… 14 h 11
Alors qu’elle attend patiemment en ayant toujours un œil sur sa boss qui échange au loin avec l’autre, un visage l’obsède. Or, s’il y a bien une chose qu’elle sait, c’est qu’elle doit se faire confiance.
14 h 12
Alors qu’elle essaie de mettre de l’ordre dans ses idées, elle fait un tour d’horizon et scanne les alentours. Le parking n’est pas encombré, mais elle aperçoit un homme ayant tout l’air d’un touriste récupérant, après une longue balade, dans sa voiture. Devant témoin, Geneviève ne craint rien. Alors, comme elle le lui a ordonné, Noémie insère la clé de voiture, démarre et quitte à folle vitesse la plage des Trépassés.
2 heures plus tard.
Si on lui avait dit qu’elle avait autant d’influence, elle aurait pris ses responsabilités plus tôt. Car désormais, c’est avec elle qu’il va falloir compter !
Là, sur le chemin escarpé qui mène au point de départ des célèbres Lavatubes d’Hitiaa (ces tunnels de lave dont les touristes raffolent pour faire le plein de sensations extrêmes), à l’image des eaux vives qui descendent la montagne, Noémie se sent investie d’une force.
« Audrey, comme moi, vous la sentez ? »
Dubitative, la célèbre romancière de polars écolos qui se demande encore comment la jeune stagiaire a retrouvé sa trace, fait non de la tête.
« Soyez attentive… fermez les yeux et inspirez. Vous la sentez, là ?
– Toujours pas, non » répond Audrey sceptique. La meilleure défense étant l’attaque, elle enchaine : « Mais de quoi parlez-vous, Noémie ? Je vous ai connue plus directe. Arrêtez de tourner autour du pot, vous me faites peur. »
Son rictus est incontrôlable. À sa réaction, Noémie sait qu’elle vient de faire mouche.
« L’angoisse, Audrey. Elle flotte dans l’air de façon épouvantable. Et vous le savez, car vous avez le nez fin. »
Exquis Cadavre exquis Saison 2 Episode 62
par Chloé Tomasini- Nicanoto
Sept fois à terre, huit fois debout
Chloé Tomasini- Nicanoto
Ébranlée, Audrey semble prise de tremblements incontrôlables. Réelle peur ou manipulatrice hors pair ? Difficile de trancher. Mais Noémie s’adresse à une écrivaine, pas à une comédienne. Alors, elle laisse passer un temps pour accentuer l’angoisse, puis reprend :
« Comment pourrait-il en être autrement ? Vous, les auteurs de la grande famille du Noir, vous passez votre temps à imaginer des histoires pour effrayer vos lecteurs, les angoisser, leur faire vivre des émotions qui les bouleversent. Mais, arrêtons la comédie deux minutes, vous voulez bien ? C’est VOUS qu’on prend à la gorge, les auteurs qu’on oblige à travailler à outrance, produire, toujours produire, produire plus ! On ne vous laisse plus le temps d’ouvrir votre esprit et de laisser venir à vous cette satanée imagination. On vous impose des délais intenables qui vous accablent, vous pervertissent et vous usent. Mais jusqu’où ira-t-on ? Jusqu’à quand allez-vous vous laisser faire ? »
La question ne nécessite pas de réponse. Noémie sait que la célèbre romancière a invoqué une conférence sur le crime à Toulouse pour échapper à la croisière littéraire de Claude France. La goutte d’eau qui aurait fait déborder le vase ?
Au bluff, elle décide d’abattre sa dernière carte :
« Je sais que vous avez menti, Audrey. Ce que je ne sais pas, c’est pourquoi. »
Audrey réalise qu’elle a terriblement sous-estimé la jeune femme. Le parcours qu’elle avait prévu est semé d’embuches, mais une chose est certaine, elles ont des valeurs communes : le mérite et la persévérance.
Alors qu’elle récapitule les événements de ces derniers jours, un célèbre haïku japonais lui revient en tête : Sept fois à terre, huit fois debout. Tomber n’étant pas une fin en soi puisqu’on se relève toujours, Audrey a une idée. Et elle a bien l’intention de la mettre en œuvre. Pour commencer, elle va prendre les choses en main.
« Donnez-moi vos clés de voiture. Et suivez-moi ! »
Noémie hésite. C’est trop facile. Peut-elle réellement lui faire confiance ?
Pour couvrir le bruit assourdissant du torrent à côté d’elles, elle parle plus fort :
« Si vous êtes celle que je pense, suivez-moi, répète Audrey. Si vous voulez comprendre qui est derrière tout ça, venez, j’ai quelque chose à vous montrer. »
Ne voyant aucune réaction de la part de Noémie, Audrey lui assène :
« Et ne me faites pas perdre mon temps ! »
Piquée au vif, Noémie se met en mouvement et lance les clés à Audrey qui, surprise par la vivacité du geste, s’élance pour les rattraper. Mais, dans la précipitation, les clés tombent à l’eau. Elles sont maintenant coincées au milieu de nulle part.
Exquis Cadavre exquis Saison 2 Episode 63
par Jérémy Bouquin
3 M
Jérémy Bouquin
« Geneviève, faut confiner ! Tous les confiner ! »
3 M est fou devant son écran plat, son visage déformé par la focale, les lunettes miroir rondes qui barrent son visage blême.
« Ils vont tous y passer, pire qu’une pandémie ! »
Ce taré appelle Geneviève du fond des sous-sols oubliés de la BilideNopo – la Bibliothèque des Littératures déviantes, Noires et Policières.
Maurice Marcal Maiplaid, dit « 3 M ». Un blase qui cache surtout un pseudo foireux pour un chat échangiste.
Le mec est encyclopédiste. Depuis des années, il se donne pour mission hallucinante et monastique d’archiver la moindre information concernant un auteur du noir. Agoraphobe, hypocondriaque, complètement nu, cadavérique, il ne porte que ces lunettes, fume sa pipe à crack et avale des chocapics.
Son unique lien avec l’humanité reste Geneviève. Il visiophone uniquement pour la bonne année. Alors quand il se décide à l’appeler le 1er juillet, c’est que l’heure est grave.
« Trop d’auteurs de polar qui meurent ! Disparaissent ! Impossible de mettre à jour son grand livre. »
Le grand Wiki sature, à la limite du bug :
« La fiction est en train de flinguer la réalité ! »
Geneviève n’a même pas terminé son café du matin que 3 M lui sort un gros délire quantique.
« La vie vire au récit sous amphétamine, il faut ralentir l’ensemble ! Faut confiner les derniers vivants !
Geneviève voudrait le rassurer, lui expliquer que l’affaire avance, mais voilà que 3 M en remet une couche :
« Un cadavre exquis ! Cela vire au génocide sublittéraire. Faut appeler Bourgoin !
– Hein ?
– C’est comme une signature ! Le polar n’est pas un genre comme les autres : c’est la littérature du réel avec plomb. Un bisphénol d’actualité. Une centrifugeuse verbale… » Il cherche une autre métaphore tarabiscotée, mais plante. « Il colle à l’actualité, dénonce les problèmes sociétaux. »
3 M reprend son souffle :
« Un cadavre exquis ! David L, Nicolas L, les autres… Ils sont victimes d’un Serial Exquis Killer ! Un tueur de réalité. Il faut arrêter cette folie ! »
Geneviève aurait mieux fait de ne pas décrocher. Elle en a les tympans qui claquent, l’impression d’une gueule de bois qui monte. Elle hésite entre sourire et faire le 115.
« Tu comprends, Geneviève ? »
Non ! Évidement qu’elle ne calcule pas. L’autre est en plein bad trip. Elle a perdu le fil dès le mot confinement.
« Maurice, tu dois arrêter la fumette… »
Abasourdi, il la regarde un long moment. Une larme roule sur son visage.
« Je vais devoir te laisser…. La connexion est mauvaise. »
Geneviève profite du silence pour rapidement claquer l’écran de son notebook.
Triste moment, qu’elle pense amer. C’est compliqué de voir les amis sombrer. Elle trouve son mug de café au lait, pictographié d’un Batman golden âge. Il est maintenant tiède. L’aromatise d’un doigt de scotch, cela sera toujours plus efficace qu’un Efferalgan 1000.
Une pandémie littéraire ? Elle ne les a pas rêvés, tous ces auteurs morts ! « Non Geneviève, reprends-toi ! » Elle avale cul sec le noir. Tout cela est bien réel.
Exquis Cadavre exquis Saison 2 Episode 64
par Philippe Hauret
Mer nature
Philippe Hauret
L’événement débuta par une sorte d’étrangeté visuelle barrant la ligne d’horizon. Mais les clients du Procope étaient trop préoccupés par le contenu de leur assiette pour imaginer un seul instant l’imminence d’une catastrophe. Geneviève avait été séduite par l’endroit et y était revenue. Elle venait de liquider son troisième rhum arrangé et commençait à bien aimer la vie. C’est alors qu’une sirène se déclencha et la fit bondir de sa chaise. Durant quelques secondes, la sidération l’emporta, chacun cherchant à comprendre le motif de cette alerte. Puis les regards se tournèrent vers l’immensité bleue de l’océan et découvrirent avec effroi la montagne d’eau qui se dirigeait droit sur eux.
Geneviève se leva. Sans un mot, uniquement mue par son instinct de survie, elle traversa la salle en courant. Dès qu’elle fut dehors, ses foulées s’allongèrent, son rythme s’accéléra. La peur lui donnait des ailes, même si elle ne savait pas dans quelle direction fuir. Derrière elle, le ciel virait au noir, on entendait les premiers cris de terreur, et le grondement annonciateur du désastre. Sous la chaleur écrasante, Geneviève continuait de courir, essayant de gérer au mieux des remontées de rhum banane. La panique gagnait la ville, les voitures étaient abandonnées sur place, les gens fuyaient en hurlant, certains chutaient, d’autres, incapables de réagir, restaient prostrés et se mettaient à prier. La vague tueuse se rapprochait, elle allait bientôt semer le chaos et imposer son silence mortel à toute forme de vie. Juste devant Geneviève, un jeune homme perdit le contrôle de son scooter avant d’aller s’éclater le crâne contre un trottoir. Le moteur de la machine tournait encore. Geneviève n’hésita pas une seconde. Elle enfourcha l’engin et tenta de s’éloigner le plus vite possible de la côte. Tout son être se mobilisait pour garder l’équilibre et éviter la horde d’estivants mélangée aux locaux qui déboulaient de chaque rue. Mais une estafette surgit et la percuta durement, l’envoyant valdinguer sur le bitume chauffé à blanc. Sonnée, elle se releva. Son genou droit pissait le sang. Pire encore, face à elle, le monstre sombre et liquide se dressait, détruisant d’un coup de langue les maisons les plus fragiles, charriant les arbres, les voitures et le mobilier urbain, avalant sans distinction femmes, hommes et enfants…
À cet instant, Geneviève sut qu’elle allait mourir. C’était donc maintenant à son tour de rejoindre le grand tout, à moins qu’il ne s’agisse plutôt d’un grand rien…
C’est alors qu’elle vit un échafaudage accolé à un immeuble dont on ravalait la façade…
Exquis Cadavre exquis Saison 2 Episode 65
par Sylvain Forge
Caïpirinha sur front de mer
Sylvain Forge
Hagarde au milieu de la foule hystérique, des contusions sur tout le corps après sa chute, Geneviève entendit dans son dos le tumulte de la catastrophe qui se pressait. Sans se retourner, elle fonça vers les échafaudages, courant à perdre haleine.
Hissée au niveau du premier plateau, elle opta pour une échelle de bambou pour s’élever plus encore. Arrivée à hauteur d’une terrasse, elle l’enjamba. Au même instant, un vacarme éclata en contrebas.
L’échafaudage venait de céder, emporté par la masse torrentielle où tout était mélangé : les immondices, les touristes en short, les bêtes, des débris de toutes sortes et des morceaux de maisons.
Elle crut même apercevoir le 4×4 blanc de David Longneck, brinquebalé par une vague d’une violence extraordinaire.
L’immeuble où elle avait trouvé refuge vibrait comme une attraction de Disneyland ; la terrasse donnait sur un studio en construction. Elle entra et rejoignit un couloir élégant qui menait vers un ascenseur (hors d’usage) puis vers l’escalier de service.
Le bâtiment était luxueux, mais abandonné. Ne sachant que faire, elle décida de gagner le toit-terrasse.
Arrivée au dernier étage, elle réalisa toutefois le risque qu’elle prenait. Ainsi à découvert, elle ferait une cible parfaite pour les satellites espions et autres drones de ses ennemis. Elle avait lu sur internet que ces cinglés n’hésitaient pas à se servir de technologies chinoises particulièrement éprouvées comme ces drones qui imitaient le battement des ailes d’un oiseau à l’aide d’une paire de manivelles entraînées par un moteur électrique. Chaque modèle possédait une caméra haute définition, une antenne GPS et le dernier cri de la détection thermique.
Que faire ?
Un des appartements, dont la porte était restée ouverte, donnait sur une autre terrasse équipée de jardinières. Depuis que la vague avait emporté le Procope Exotique et tout le quartier autour, l’eau était coupée partout. L’immeuble ne faisait pas exception. Mais Geneviève avait plus d’un tour dans son sac. Elle n’avait pas traversé tous ces périls pour se faire bêtement abattre par un automate à plumes.
Réfrénant son dégoût, elle s’agenouilla devant la cuvette des toilettes et utilisa l’eau au fond pour s’asperger copieusement avant de se diriger, ruisselante, vers le bac à fleurs. Elle prit de la terre par poignées et s’en macula le corps jusqu’à faire disparaître le plus petit reliquat de peau blanche. Après dix bonnes minutes de ce labeur, elle se dirigea vers le miroir de la salle de bain et jugea qu’elle était méconnaissable.
Les détecteurs thermiques l’auront dans le baba, songea-t-elle.
Elle prit la direction du toit et tomba… en plein cocktail.
Des officiers de marine, impeccables dans leur tenue blanche, devisaient aux côtés de leurs épouses en robes de soirée. Tout ce beau monde était aux premières loges pour observer la furie des eaux qui se déchaînait, une dizaine d’étages en contrebas.
Nue et couverte de boue de la tête aux pieds, Geneviève pouvait passer pour une rescapée du tsunami. Aussi, on ne lui prêta guère attention.
Au bout de quelques minutes, la surprenant en train de chiper une poignée d’amuse-gueules, un serveur en livret s’approcha d’elle.
Il tenait un plateau en argent sur lequel se trouvait un téléphone.
« Un appel pour vous, madame. »
Interloquée, Geneviève prit le mobile.
« Geneviève, tu es là ? »
Elle frémit.
C’était la voix de Claude France.
Exquis Cadavre exquis Saison 2 Episode 66
par La grosse Dame
66
L’heure de vérité
La grosse dame
Voyant le malaise de Geneviève, Vic lui demanda de quitter l’hôpital, de prendre un taxi et de regagner son hôtel afin de se préparer pour le rendez-vous du début de soirée au Procope.
« Je te rejoindrai plus tard, pour l’instant nous avons un vrai problème à régler, là. Il va falloir que je fasse appel à quelques amis que j’ai sur l’île car là, une magie noire puissante est à l’œuvre. Il faut que je fasse parler cette chose qui semble être Elias Armand. Il va falloir que je l’extrade et l’emmène vers les terres du milieu, là où les esprits de cette île opèrent, et je ne peux pas te prendre avec nous. »
Sur ces paroles, notre éditrice ne se fit pas prier et gagna la sortie de l’hôpital. À peine fut-elle sur le parking qu’elle entendit un bruit de rotor au-dessus de sa tête.
Un hélicoptère se posait sur le toit de l’hôpital
Geneviève ne sut pas que le pilote n’était autre que Patrice G, l’ancien collègue de Vic qui venait lui prêter main forte. Ainsi ils purent embarquer le corps de Francis T, direction la vallée de la Papenoo jusqu’à « Fare Hape ».
Sur ce Marae, lieu sacré qui servait aux activités sociales, religieuses et politiques des Polynésiens, il faudrait faire appel aux ancêtres et peut-être avoir recours à un sacrifice pour faire parler l’esprit d’Elias enfermé dans le corps de son ange gardien luciférien.
Patrice avait emporté avec lui quelques tiki. Lui-même, comme ses statues de bois, était porteur du mana. Patrice était un tiki vivant, il portait en lui la puissance et la force des ancêtres. Il faisait aussi office de tahua, il était un prêtre et appartenait au clan des sorciers guérisseurs.
Aussi, quand l’hélicoptère arriva avec le corps inerte de Francis T, les officiants étaient déjà à l’œuvre. Les incantations allaient bon train. L’air était saturé d’énergie. La terre grondait, quelque chose de puissant était à l’œuvre. Des forces telluriques s’affrontaient. Patrice sentit une catastrophe imminente, la nature était en marche.
Il y aurait un sacrifice ce jour sur ce lieu sacré, Francis-Elias allait mourir, mais ça ne suffirait pas à contrer la colère de dame nature.
Puis, sur le manae, la magie opéra. Elias eut un sursaut, celui du condamné. Il se réveilla avant de rejoindre les limbes. Il se confessa et avoua le plan machiavélique qui était le sien, mais surtout celui de son mécène, cet être intrigant, ce mystérieux éditeur-diffuseur qui projetait d’en faire le plus grand et l’unique représentant de la caste des polardeux.
Aussi, tel un film en noir et blanc, l’avenir de Francis-Elias se dévoila. Voici ce que Vic et Patrice virent et entendirent…
Exquis Cadavre exquis Saison 2 Episode 67
par Marek Corbel
67
L’Imaginaire de Lucifer
Marek Corbel
Elias Armand plastronne tout en se rapprochant du pupitre. Il savoure plus que l’instant. Ce stratagème, il le tient depuis tant de décennies. Il considère que la carapace de son avatar de neveu, Francis T, se trouve bien mieux à sa place ici que dans un hôpital glauque des tropiques.
Il essaye tant bien que mal de se frayer une voie au milieu de la cohue de ce Tout-Paris littéraire de moins en moins polardier. Et pour cause… Oui, Elias Armand est sur le point d’aboutir à la conclusion de son funeste projet. Une journaliste au tailleur un peu trop cintré s’accroche au revers de son costume.
« Monsieur A, une déclaration peut-être sur les étranges évènements qui endeuillent depuis quelques semaines le monde du roman policier ? Cela remet-il en cause la parution de votre roman ? »
Le garde du corps en blazer rouge repousse l’impudente sans trop de ménagement. Elias Armand goûte assez peu la rudesse des molosses de la société de sécurité que lui a imposée l’éditeur-diffuseur. De ce qu’il en a compris, le patron de ladite société est un major retraité de la police nationale. Un certain Éric D, spécialisé dans le génital, comme il l’assène de sa voix grasseyante.
Voilà que ce dernier écarte sèchement deux curieux qui bloquent l’accès d’Elias à l’estrade où est disposé le pupitre. L’écrivain en devenir n’en peut plus de la chaleur suffocante de cette immense salle carrelée du 6ème arrondissement. Les larges baies vitrées ouvertes n’y changent rien.
Le mystérieux éditeur-diffuseur, à l’origine de la manifestation du jour, a vu les choses en imposant. Tandis que les coupettes en plastique s’entrechoquent, un Francis-Elias en sueur teste le micro. Il considère l’assistance non sans une certaine délectation. Ils sont venus, ils sont tous là, y a même Naulleau le critique maudit. Ce qui reste de chroniqueuses du noir a fait le déplacement malgré les circonstances. Il reconnait ainsi cette Ophélie C, une des flingueuses de la bibliothèque parisienne où Geneviève V avait pour habitude de zoner.
Francis-Elias prend son souffle avant de se lancer dans le soliloque transmis dans une enveloppe anonyme par son intrigant éditeur-diffuseur. Il se raisonne une énième fois. Les desseins de cet énigmatique bienfaiteur confortent son projet : organiser la Saint-Barthélemy du roman policier hexagonal. Entre les guerres intestines des ligues d’auteurs, la vénalité de Claude France, les naufrages polynésiens, de ce côté-là effectivement la voie est libre.
L’enveloppe physique de Francis T. confère au seul auteur de polar autoproclamé debout une épaisseur inédite. Il avale d’une traite le fond du gobelet posé sur le pupitre. Il attaque, déterminé.
« Il m’incombait en dépit des réserves que certains d’entre vous nourrissent sur ma personne de maintenir le flambeau du roman de genre… »
Exquis Cadavre exquis Saison 2 Episode 68
par Aurore Gautry
68
Alliance
Aurore Gautry
[…] le 6 de 61 à 76 […]
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[…] Livre 6 […]
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[…] Et le 6 de 61 à 76 ci après […]
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A reblogué ceci sur Le Bien-Etre au bout des Doigts.
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merci Françoise
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