Salverney, Jean-Michel Leboulanger

Le livre : Salverney de Jean-Michel Leboulanger Paru le 7 septembre 2016 chez Les éditions du 38. 20€. (331 p.) ; 21 x 14 cm.

4e  de couv : 

Paradis ou enfer ?

« Ian ferma les yeux. Tout autour de lui respirait la joie de vivre, l’insouciance, la bonté. L’innocence… L’île était belle, gaie.
Exactement comme on la lui avait décrite. »

Le reporter photographe Ian Debaeker débarque sur l’île de Salverney, bien décidé à percer les petits secrets de ces habitants si paisibles. Trop paisibles ? Le coeur de Ian n’est que désespoir et vengeance destructrice.

Il sera leur pire cauchemar !

De par ses origines bretonnes et maritimes, Jean Michel Leboulanger a toujours été attiré par les voyages. Il en ramène des images, des visages, des parfums et des sons dont il parsème ses romans pour leur donner des atmosphères sans pareil, loin des guides touristiques ou des clichés exotiques habituels. Il y parle des hommes et des femmes, de leurs relations, avec dérision et humour même dans les situations les plus désespérées.

 

L’auteur : Jean-Michel Leboulanger est né le 26 août 1959 au Mans. Originaire de Saint Malo par sa mère, il y a vécu de nombreuses années et y revient régulièrement comme on retourne à ses racines.
De par ses origines bretonnes et maritimes, il a toujours été attiré par les voyages. Il en ramène des images, des visages, des parfums et des sons dont il parsème ses romans pour leur donner des atmosphères sans pareil, loin des guides touristiques ou des clichés exotiques habituels. Il y parle des hommes et des femmes, de leurs relations, avec dérision et humour même dans les situations les plus désespérées.
Jean-Michel Leboulanger vit désormais entre Bretagne et Normandie, non loin de la mer.

 

Extrait :
Prologue
La mer se fracassa contre le pied de la falaise, houle émeraude gonflée d’écume, puissante et brutale. Dans un bruit assourdissant, elle explosa en milliers d’embruns cristallins sur les rochers offerts, se dispersant avec dépit avant de rebondir à nouveau dans la même rage recommencée.
De toute éternité, elle luttait sans relâche contre ce bout de terre et de pierre, obstacle incongru qui lui barrait la route vers le large et l’horizon lointain, obligeant ses vagues à contourner l’île et à se résoudre à cette présence. Deux fois par jour, à la faveur de la marée haute, elle se lançait à l’attaque de la forteresse. Et deux fois par jour, elle se retirait au loin comme une soumission, laissant en offrande sur les rives de galets gris les objets abandonnés par les hommes en son eau profonde.
Du haut de la falaise, Léonard Bougerie avait aperçu cette forme rouge bercée par les vagues avant d’être rejetée sur la plage qui ne se découvrait qu’à marée basse. Avec sa mauvaise vue, il l’avait d’abord prise pour un morceau de Zodiac, ou une voile pourpre, comme celles qu’on voyait gonfler sous la brise aux mats des vieux gréements qui ondulaient doucement entre Channel et continent.
Puis, comme d’habitude, Léonard était descendu le long du chemin escarpé jusqu’en bas, au milieu des roches rondes et instables. Aussitôt, il avait commencé à retourner les pierres avec son pic en fer à la recherche d’étrilles, voire d’un beau crabe pour peu qu’un tourteau se fût fait prendre au piège dans une flaque d’eau. Ce fut le cas plusieurs fois. La pêche s’annonçait excellente.
Une heure avait passé. Léonard fouillait au milieu des rochers couverts d’algues brunes et luisantes, parmi les miroirs d’eau saline où grouillaient des crevettes translucides et vivaces. Sentant la fatigue arriver, le vieil homme s’assit au sec et fit le point sur sa pêche, heureux d’avoir trouvé de quoi faire un bon repas pour le soir.
À moins qu’il ne vende ses trouvailles au pub, chez John Le Lièvre… ?
Léonard, du haut de son mètre soixante-trois et de ses soixante-quinze printemps, venait régulièrement au bout de l’île. Surtout quand il faisait beau comme maintenant, une jolie matinée d’automne… Suffisamment ensoleillée pour être ivre de la lumière de fin de saison, et avec un air assez frisquet pour rester éveillé et bien respirer. Tout à sa rêverie, il sortit un thermos de sa musette et but une gorgée de thé en regardant le large. L’île de Guernesey flottant à sa gauche, et Alderney plus loin à droite, dissimulée dans une brume bleutée qui se perdait en direction du Cotentin.
Soudain, il aperçut à nouveau la forme rouge allongée à vingt mètres de lui. De plus près, cela ne ressemblait plus à une épave, ni même à une voile perdue ou déchirée. Les couleurs étaient trop vives pour que c’en soit une. Et puis, on avait l’impression que ce bout de toile, ou de tissu, enveloppait un objet.
Ou bien un corps…
Le cœur de Léonard Bougerie se mit à battre un peu plus fort. Au fil des années, il avait déjà croisé de ces restes humains que la mer rejetait de temps à autre : marins ayant basculé par-dessus bord, Français du continent, Jersiais ou plaisanciers divers venus d’Angleterre. Les plus récents étaient les passagers d’un petit Cessna perdu en mer, quelques années auparavant…
Il se leva regrettant soudain d’être en ce lieu qu’il adorait. Puis, il se dirigea vers la forme immobile, le regard figé, déjà convaincu et malheureux de ce qu’il allait découvrir sous ce qui ressemblait de plus en plus à une robe de femme à mesure qu’il approchait. Il aperçut tout d’abord une jambe nue dépassant de cet ultime linceul carmin. Le corps était bleu, presque mauve, et l’eau avait éclaté la peau par endroits, laissant entrevoir des chairs à vif gorgées d’eau. Soudain apparut un crabe minuscule et blanc, presque transparent, s’extirpant vivement d’une des plaies ouvertes après avoir déjeuné. Les mouches et les puces de mer bourdonnaient tout autour en sautillant d’excitation pour participer à ce festin inespéré.
Léonard fut pris d’un haut de cœur, à la limite de vomir. D’un geste de la main, il chassa tous ces charognards avant de soulever le tissu trempé qui collait au cadavre.
Malgré le séjour dans l’eau, celui-ci n’avait pas beaucoup gonflé et avait conservé une forme humaine. Léonard découvrit une jeune femme. Ses longs cheveux blonds, où s’emmêlaient de fines algues vertes, étaient collés sur le visage tuméfié. De nombreuses meurtrissures brunâtres maculaient son front et ses joues de croûtes épaisses. La pauvre fille avait été malmenée par la mer, fracassée sur les rochers. Sans doute rejetée, puis reprise plusieurs fois par les vagues au fil des marées avant que Léonard finisse par la trouver.
Il resta encore quelques minutes accroupi auprès de la femme, attristé par le sort de cet être jeune qui avait trouvé la mort si tôt. Enfin, revenant à la réalité, il se décida à partir pour avertir Bobby, le seul policeman de l’île. La marée allait bientôt remonter, et il fallait faire vite si on voulait récupérer le corps avant que la mer s’en emparât de nouveau.

La Kronik d’Eppy Fanny

Salverney, Jean-Michel Leboulanger

L’histoire :

Une île Anglo-normande, inventée par l’auteur, à mi-distance entre Jersey et Guernesey : Salverney, la confidentielle. Salverney est un état indépendant rattaché au Baillage de Jersey, mais avec un conseil autonome. L’économie de l’île repose sur la culture des primeurs, vendus sur le grand marché de St Hélier. Les habitants trouvent tout le nécessaire chez Matthew Le Roux, le seul épicier, supermarché, boulangerie, tabac-journaux et hôtel de Salverney. C’est Matthew qui a mis en place le réseau nécessaire à la vente des primeurs de l’île. Puis il y a le pub. Incontournable.

Les rares touristes qui se rendent sur l’île ne restent pas plus d’une journée. De temps en temps, des personnes en mal de solitude s’installent brièvement. Des hippies étaient restés quelques temps, un couple. Puis un accident, un corps qui chute des falaises et que la mer recrache. Et les îliens sont à nouveau restés entre eux, même si, par moment, la grande maison sur la lande s’anime et qu’un hélicoptère y dépose son hôte mystérieux.

C‘est là que débarque un matin un inconnu. Il s’appelle Ian Debaeker et se présente comme un photographe.

Cela ne surprend guère. Il n’est pas le 1er à venir mitrailler cette île si belle.

Extrait page 33 : « L’île s’étendait sur une ligne parfaite du nord au sud, longue langue de terre, de rocailles et de sable de trois kilomètres sur un environ. Tout au nord se dressait une falaise sauvage que recouvrait une lande couverte d’ajoncs et qui surplombait une mer tumultueuse dont l’écume blanche dissimulait des fonds obscurs. Au sud, le terrain déclinait en une pente douce qui s’alanguissait vers la mer sous forme d’un éventail de dunes de sable beige retenues par de fins herbus dansant dans le vent. Cette partie de l’île tenait du paysage tropical… »

Ian va faire la connaissance de :

Rébecca Le Lièvre, la serveuse du Pub et de son père qui en est le propriétaire ; du vieil Odin, père de Matthew Le Roux, qui doit son surnom à sa passion pour les vikings et les anciens dieux, terrifiant lorsque ses délires le submergent, c’est qu’il n’a plus toute sa tête ; Matthew, le Président du Conseil de Salverney ; Mary Ramsey, qui tient un B’n’B et dont l’occupation majeure est d’observer ses congénères ; la très belle Ellen O’Neil et Brian son vieux professeur de mari ; puis Jimmy, l’informaticien de Matthew, qui boit trop et importune les filles du continent. Sa mauvaise réputation lui colle à la peau, et il ne fait rien pour redorer son blason.

Aucun d’entre eux ne devine que Ian est un homme en colère, et qu’il est venu sur l’île pour foutre la merde !

Ian, le journaliste globe-trotter, habitué des conflits, a, dans ses bagages, une photo aérienne de l’île avec au dos les mots suivants :

(Extrait page 31) « Des bisous de Salverney. Tu devrais venir ici pour faire un article, il y a du lourd. Je rentrerai à la fin du mois. Tu me manques. Je t’aime. Coralie. »

Car sous ses aspects d’endroit idyllique, l’île et ses habitants recèlent de nombreux secrets.

Cette photo dans ses bagages, c’est son passeport pour cette île et pour sa vengeance. Coralie, sa fille, est morte à Salverney et ce n’était pas un accident !

Ian va enquêter, être distrait et tomber amoureux. La tentatrice est si belle…

Extrait page 144 : « Ils firent l’amour en hurlant, avec hargne et violence, comme s’ils savaient qu’ils n’auraient plus jamais l’occasion de le faire à nouveau, poussant des cris de bêtes qui se transformèrent en fou rires. »

Il va suivre des pistes qui ne mèneront nulle part. Ne plus rien attendre… Désabusé, il s’apprêtera à quitter l’île. Mais avant il foutra vraiment le bordel, avec hargne. La tempête Ian s’abattra sur l’île. Et la vérité, les vérités, éclateront, dans la violence. Ne restera qu’un goût de cendre.

Ce roman nous parle de guerres, d’amitié, de perversion, de mort, de désespoir, de trahison, de trafic, de vengeance … mais aussi d’amour et de renaissance.

Il nous parle aussi de traditions vikings, du passé, plus proche, dont l’occupation des îles Anglo-normandes par l’armée allemande. Un roman riche et foisonnant. Prenant.

Et, de bout en bout, nous sommes en équilibre au bord d’une haute falaise battue par les vents, submergés par les odeurs de la lande. Par ses origines bretonnes, Jean-Michel nous fait aimer infiniment cette île fictive et ses voisines bien réelles.

Un très bon moment de lecture et un dépaysement garanti.

8 réflexions sur “Salverney, Jean-Michel Leboulanger

  1. Merci pour ce retour de lecture. Juste une précision : malheureusement, Salverney n’est plus disponible actuellement. Après avoir repris mes droits auprès des Éditions du 38, je n’ai pas retrouvé d’éditeur, (qui voudrait d’un roman déjà édité ailleurs ?) et je n’ai pas encore bouclé une version en auto-édition. Mais j’y travaille. Merci encore pour cette article.
    JMLeboulanger

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