Nuit bleue, Simone Buchholz

Les découvertes de Ge

Et oui notre porte flingue, vous le savez sans doute, aime découvrir ou redécouvrir de nouveaux auteurs.
Aussi aujourd’hui vous propose-t-elle deux presque nouvelles têtes polardesques.


Le livre : Nuit bleue de Simone Buchholz. Traduit de l’allemand par Claudine Layre. Paru le 4 mars 2021 chez Atalante dans la collection Fusion. 19€90. 230 p.) ; 20 x 14 cm

4e de couv :

Nuit bleue

« Joe, qui vous a brisé les os ?
– La vie. »

Au Blaue Nacht, la procureure Chastity Riley écluse des bières et trouve le réconfort auprès de sa bande d’amis. Mise sur la touche après avoir fait condamner son supérieur, elle est désormais chargée de la protection des victimes. À l’hôpital l’attend un homme roué de coups, un Autrichien qui refuse de parler. C’est sans compter sur la force de persuasion de Chastity… prête à mettre les pieds dans le plat de la bonne société hambourgeoise.

Dans la lignée des romans d’une ville, Chastity Riley est Hambourg, ville-port et ville-monde, ville punk-rock.

© Céline Gobillard

L’auteur : Simone Buchholz est née en 1972 en Allemagne, dans la région de Francfort.. Simone Buchholz vit dans le quartier de St Pauli à Hambourg depuis le début des années 1990. Elle a d’abord été rédactrice pour des magazines dans lesquels elle traitait de l’amour, de la jeunesse et des affaires. Désormais, elle s’intéresse davantage au meurtre et au chaos. Si, autrefois, sa vie a été marquée par les excès, elle préfère aujourd’hui une existence paisible et laisse ses personnages s’enivrer des vices qu’elle a délaissés.
Simone Buchholz donne naissance à un personnage récurrent et à une famille, de ceux dont la vie nous est chère et que l’on prendrait bien pour amis. Concise et poétique, tour à tour drôle et piquante, son écriture emporte le lecteur.
Lauréate du Prix du Polar Allemand en 2019 pour Mexikoring, Simone Buchholz est traduite en Angleterre et en Italie.

Extraits :
« Un coup de pied dans le rein droit, tu tombes à genoux.
Un dans le ventre, tu t’écroules.
Encore un dans le rein, à gauche cette fois, faut que le calmerevienne rapidement.
Puis les matraques sortent des blousons.Trois blousons, trois matraques.
Jambe gauche, jambe droite.
Bras gauche, bras droit.
Et six pieds pour douze paires de côtes.
C’est un diable à têtes multiples, ton diable perso
Commandé exprès pour toi.
Puis : la pince étau.
Index droit.
Impeccable craquement.
Ils ne le savent pas, semble-t-il : tu es gaucher.
Encore un coup de pied à un endroit déjà cassé.
Puis ils te laissent là, par terre.
Ça a duré cinq minutes, peut-être six.
La douleur est éclatante et déstabilisante et brûlante et froide
en même temps et partout ; de ta main droite s’écoule du sang chaud, presque réconfortant.
Alors c’est comme ça »

 

  » « Je vous avais dit de ne pas bouger.
— Pas possible de faire autrement.
— Et à part ça ? Vous avez passé un bon week-end ? »
J’ouvre la portière, balance mon sac sur le siège arrière et me laisse tomber sur le cuir noir.
« Un week-end de folie. C’est définitif, c’était ma dernière excursion de merde dans une campagne de merde. »
Il me regarde et secoue la tête.
« Qu’est-ce qui vous a pris, Chastity ? Ficher le camp de la ville. Vous qui avez tant besoin de votre béton. »
Qu’est-ce que j’en sais ? Je me suis dit, écoute tes potes. Faut que ça change. Ça ne vaut rien d’être tout le temps assise. Depuis le cirque sur le port, officiellement je suis toujours procureure, mais officieusement je suis au placard. Ils ont longuement tergiversé : comment gérer une femme comme moi à l’avenir ? Vu de l’extérieur, convaincre son propre patron de corruption devrait valoir une promotion, mais à l’intérieur de l’institution, on trouve ça moyen.
En plus, il y a eu usage illicite d’arme à feu.
Que j’aie sauvé la vie à Calabretta est une chose, que j’aie tiré non pas dans la jambe mais dans les bijoux de famille d’un sale type en est une autre. Je ne sais pas ce qu’il est advenu de lui, je n’ai plus jamais entendu parler de cette affaire et il n’y a pas eu le plus petit entrefilet dans la presse. Aucune idée de la manière dont les collègues s’y sont pris, je ne veux pas le savoir de toute façon. Ils m’ont assuré que je n’avais rien à craindre, ils ont confisqué le pistolet militaire de mon père et, dans un premier temps, ils m’ont retirée de la circulation. Après m’avoir laissée plusieurs mois en plein no man’s land, ils se sont pointés avec un nouveau job. Un poste créé spécialement pour moi : la protection des victimes. »

Le post-it de Ge

Nuit bleue, Simone Buchholz

Mais quel plaisir de lire à nouveau Simone Buchholz.  C’est le second roman que je lis de cette autrice allemande. Le premier c’était il y a plus de cinq ans déjà.  Mais je n’avais pas oublié Chastity Riley, cette femme procureur à Hambourg. Un bout de femme énergique mais aussi une héroïne sombre et pugnace.

Elle vit à Hambourg dans le quartier Sankt Pauli, c’est un des quartiers de Hambourg en bord de l’Elbe qui abrite le port nord de Hambourg. Le quartier de St. Pauli est particulièrement célèbre pour son quartier rouge autour de la rue Reeperbahn . c’est la que les marins de passages viennent s’encanailler. C’est là que l’on trouve les bars, night-clubs et sex-shops.

 Longtemps considéré comme le quartier chaud de Hambourg, Sankt Pauli devient peu à peu le quartier branché de la ville. Même si notre procureur aime à se retrouver attablée au Blaue Nacht pour boire quelques bières en bonne compagnie.

Vous l’aurez compris Chastity Riley et son quartier ne font qu’un. Et comme elle Hambourg est un personnage central de ce roman. Même si cette fois notre téméraire enquêtrice nous embarque ailleurs.

Je ne sais pas vous, mais moi j’aime c’est ville port, ouverte sur le monde. A l’instar de Barcelone, Marseille ou même le Havre, il règne dans ces métropoles une atmosphère quelque peu différente qui se marie parfaitement avec le noir, avec le polar.

Et Hambourg ne déroge pas à la règle.

Alors notre histoire, et bien A Hambourg justement, la procureure Chastity Riley a été mise sur la touche pour avoir tenté de confondre son patron, qu’elle accuse de corruption. Elle est désormais en charge de la protection des victimes. Sa nouvelle mission est de recueillir le témoignage d’un Autrichien passé à tabac mais qui se mure dans le silence. Elle obtient une piste qui la conduit sur les pas d’un trafiquant de méthamphétamine.

Attention ça va déménager. Vous allez êtes pris dans un tourbillon. Il faut dire que l’écriture de Simone Buchholz a quelque chose de punk. Elle va droit au but, sa plume est concise, elle est piquante aussi. Son style et tantôt onirique surtout quand elle parle et décrit l’ambiance de sa ville, tantôt speed quand il s’agit de faire avancer son intrigue. Un savant mélange qui nous entraine dans un rythme effréné. Avec Chastity Riley on est souvent en apnée.

On se met à aimer Hambourg, on a envie d’aller la découvrir et on s’attache à notre héroïne. Perso j’espère la retrouver très vite ainsi que sa créatrice. Car après « Nuit bleue » et après « quartier rouge » on peut le dire… décidément Mesdames, les couleurs primaires vous vont à ravir.

Autres extraits
« Si à Hambourg quelqu’un se fait tabasser, tirer dessus ou écraser par une voiture et se retrouve à moitié mort, si quelqu’un est poussé d’un pont ou d’un immeuble et survit, c’est moi qui en suis chargée.
Mais uniquement de la victime, pas de l’enquête.
Bref, un job super excitant.
Laissez-moi passer, je viens pour tenir la main.
Les premières semaines, je suis sagement restée à couvert et j’ai fait ce qu’on attendait de moi. Désormais, je n’ai plus une vision aussi étroite de mon rôle. Je garde pour moi les rares cas qui me tombent entre les mains, même si ce n’est pas ce qui était prévu. Pour l’instant, personne n’a protesté. Que voulez-vous qu’ils disent ? Nous sommes tous dans la même galère après tout, et elle s’appelle : surtout pas de scandale au sujet du type sans roubignolles.
Voilà.
Dans l’ensemble, je ne suis évidemment guère satisfaite de ce provisoire.
Dans l’ensemble, je m’ennuie tout le temps.
D’où ma folle idée d’excursion. »

 »

« Dans mes mains, le costume lourd et noir. Un tissu de prix, aucune étiquette. Visiblement fait sur mesure. La chemise noire est anglaise, les chaussures américaines.
Autour de moi, les murs sont gris clair et brillants. Sous mes pieds, le lino glissant engloutit bruits et odeurs, et la lumière des néons la moindre chaleur.
J’aimerais presque avoir quelqu’un à mes côtés.
C’est comme à chaque fois que j’ai entre les mains des trucs de ce genre, des vêtements, l’arme du crime ou d’autres objets ensanglantés ayant été en contact avec une personne qui ne s’en est pas très bien sortie. Je m’imagine qu’ils vont me parler, me raconter un peu ce qui s’est passé. Comme s’ils avaient une mémoire. Mais à chaque fois je ressens seulement une impression. Aujourd’hui :
Ce n’était pas le fruit du hasard.
Je remets tout dans les poches plastique, ôte les gants et remercie les collègues de la Scientifique penchés au-dessus de leurs microscopes dans la pièce attenante. Puis je prends l’ascenseur au bout du couloir et me rends quelques étages plus haut pour examiner Calabretta.
Avant, j’étais souvent à l’hôtel de police. Maintenant, j’évite. Parce que j’ai la sensation qu’on me regarde. Ma vie est devenue tellement zigzagante : il y a quelques années, elle suivait presque une ligne droite, même si j’avais déjà tout le temps l’impression de rater les virages. »

7 réflexions sur “Nuit bleue, Simone Buchholz

  1. Je viens de terminer « Nuit bleue », lu très vite, a cause de ce style plutôt percutant qui ns emmène à bonne allure ! J’ai découvert ce personnage de Chastity Riley, bien campée, qu’on aimerait avoir comme bonne copine pour épancher ses vagues à l’âme. Si l’intrigue n’a rien d’exceptionnelle en soi, la façon dont les personnages sont présentés, se dévoilent et se retrouvent petit à petit en flash back bien dosés, leurs caractères, l’ambiance de la ville, tout cela fait de « Nuit bleue » une bien bonne lecture !

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