Et si, pour une fois, on leur donnait la parole ? Saison 2 Episode 10

Et si, pour une fois, on leur donnait la parole ?

Saison 2 Episode 10

Des interviews.

Mais pas les habituelles rengaines egocentrées des auteurs.

Parce que, finalement, dans un roman, qui va au charbon ? Le personnage !

Et si on leur donnait la parole ? S02E10

par Nick Gardel

Bonjour, vous êtes sans doute le plus jeune de mes invités. Comment puis-je vous présenter ? À moins que vous ne vouliez le faire…

Je m’appelle Christophe, mais tout le monde m’appelle Chris. J’ai dix-sept ans et, lorsque ma main rentre en contact avec celle d’un salopard, je vois son passé criminel ! Oui, je sais, ce n’est pas très marrant, mais ce n’était pas le but. En plus, je suis coincé en 1986, pas moyen d’accéder à une console de jeu digne de ce nom et en plus pas l’ombre d’une scène de sexe alors même que je suis un ado acnéique bourré d’hormones. Bref. Un jour, je livre mon secret à mes amis, Caro la vulgaire, Simon l’intello et mon meilleur ami Alain. Ce jour-là, j’aurais mieux fait de me casser une jambe, car tout part en sucette. Evidemment Lawren était ravi, c’était la base de son roman « Les larmes des cigognes », un thriller noir comme le charbon. Bon, je suis quand même content d’un truc, j’ai pu découvrir un personnage haut en couleur, mon grand-père Louis, qui m’a raconté son hallucinant périple à Tambov, en Russie durant la Deuxième Guerre mondiale.

Je n’ai pas eu l’honneur de rencontrer sa précédente héroïne, mais je me fais une idée assez précise d’elle. Et vous ? De quels traits de caractère Lawren vous a-t-il affublé ?

Bah, comme l’auteur se permet toujours d’y mettre un peu de soi, je pense à l’intelligence, la modestie, la perspicacité, la générosité, la beauté, la finesse, bref tout un tas de qualité que Lawren n’a pas vraiment assez exploité dans son bouquin. Ah, j’oubliais, je suis un bon coup au lit, mais là aussi, c’est un angle qu’il a complètement occulté. À tort, je pense, un peu de cul ça fait toujours vendre un bouquin. À côté de cela, je crois que je suis surtout un peu naïf au début du bouquin, je manque de discernement. Mais tout cela s’arrange sur la fin…

Ses plans qu’il note au brouillon terminent la plupart du temps dans la corbeille à papier et je le vois se lever en jurant. « Putain, je ne l’avais pas vu venir celle-là… »

Lawren avait déjà deux romans avec la même héroïne, comment êtes-vous arrivés là ?

En fait, je crois que je suis apparu dans le cortex de Lawren dès le début du processus d’écriture. Cela a contrarié un peu Lizie, son héroïne du « prix à payer », car je suis arrivé sans prévenir ! Bon, je me suis vite imposé. Il a toujours voulu parler indirectement de son adolescence. D’ailleurs, il avait quinze ans en 1986 et je crois que je suis un peu lui, vous voyez ce que je veux dire ? Je suis aussi une sorte de diversion, car il ne voulait pas que son bouquin, qui s’appelait au départ « Le secret de Tambov » soit un pur roman historique. Alors il m’a rapidement permis d’exister en incarnant un héros en 1986. Il n’y a pas de hasard, je crois que cette époque l’a marquée, d’autant qu’il était en voyage scolaire en Allemagne juste après l’explosion de la centrale de Tchernobyl, exposé aux pluies radioactives. Il a dû en garder des séquelles…

Niveau communication, vous échangez régulièrement ensemble ?

Lawren est plutôt du genre causant, alors pour en placer une… Durant l’écriture du roman il était plutôt cool, même si j’en avais marre d’entendre le « Deutsches Requiem » de Brahms qu’il écoutait en boucle pour se mettre dans l’ambiance… Lizie, l’héroïne de ses deux premiers romans, avait droit à AC/DC ou aux Red Hot Chili Peppers, ça donne tout de suite envie de refaire le monde autour d’un vieux rhum ! Taper la discute en écoutant Barbara Hendricks, ce n’est pas simple…

Il parle beaucoup… Mais pour l’histoire, c’est vous qui racontez je suppose.

Ah, de ce côté-là, Lawren me laisse quand même beaucoup de liberté. Souvent il commence par m’envoyer dans une direction, mais je reprends les rênes rapidement ! Ses plans qu’il note au brouillon terminent la plupart du temps dans la corbeille à papier et je le vois se lever en jurant. « Putain, je ne l’avais pas vu venir celle-là… Bon, ben, fais ce que tu veux, gamin ! » En même temps, les auteurs ne se privent pas de trouver de nouveaux personnages quand leurs anciens sont un peu usés, alors je trouve assez normal que nous décidions de notre destin, vous ne croyez pas ?

On peut parler de vos rapports ?

Sexuellement ? C’est bon, je plaisante… À dix-sept ans, je suis un peu obsédé, faut m’excuser… Sérieusement, ça se passe bien, sauf qu’à la fin du bouquin… Zut, je ne peux pas vous dire comment je finis. Cela vous aurait éclairé sur la perversité de l’auteur. Son bouquin a l’air de se vendre, alors je pense qu’on a fait du bon boulot, lui et moi.

Et depuis comment vous occupez-vous ?

Vous demandez ça à un ado en pleine puberté ? Non, sérieux, quand vous êtes coincé dans un thriller avec des tarés prêts à couper en morceaux leur prochain après les avoir violé, faut quand même se détendre un peu ! Une bonne clope, de la bière fraîche et de la gonzesse ! D’ailleurs, pas sûr que je reprenne du service, je crois qu’il a appelé ça un « one shot », voyez le genre ? Alors peut-être que je reviendrai faire un tour dans son crâne pour qu’il se mette à écrire un bon polar érotique bien cochon où je pourrais peut-être me recycler en tringlant, culbutant et jouissant à longueur de pages ! Ce n’est pas gagné, Lawren vient d’attaquer l’écriture de deux romans en parallèle : un thriller scientifique et un roman noir…

S’il se tient à son idée de one-shot, peut-être que vous n’aurez plus la parole au-delà de ce roman-ci. Je vous la laisse encore une fois… pour conclure…

Ouais les gens, il faut lire « Les larmes des cigognes ». Avec mes amis on vit quand même une aventure absolument incroyable et puis il y a Louis, mon grand-père, qui vous racontera comment il a été incorporé de force dans la Wehrmacht puis envoyé sur le front russe. Vous verrez la fin est vraiment surprenante et en plus je vais re… Aïe !! Putain Lawren, me tape pas sur le crâne comme ça, je n’allais pas spoiler, tu me connais, non ? Bref c’est un récit initiatique, un thriller, un roman historique, un ovni inclassable. C’est un peu comme si c’était son premier roman, à Lawren… Le premier d’une nouvelle ère…

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