Révolution, Sébastien Gendron

Le livre : Révolution de Sébastien Gendron – Paru en poche le 12 mars 2020 chez Gallimard en folio policier n° 907. 8€60. (404 p.) ; 18 x 11 cm

4e de couv :

Georges Berchanko et Pandora Guaperal se rencontrent dans un bar, un soir d’été. Il est en fuite avec un flingue et deux cadavres sur les bras, elle a évité un lynchage de justesse. En découvrant qu’ils travaillent tous les deux pour la même boîte d’intérim véreuse, ils décident d’unir leurs forces pour en finir avec ce système pourri jusqu’à l’os. Le temps de la révolution est venu. Mais comment mobiliser la population en plein chassé-croisé estival ? Une idée vient à Pandora : bloquer un viaduc autoroutier et menacer de se faire sauter le caisson si les Français moyens coincés dans les dizaines de kilomètres d’embouteillages ainsi provoqués ne se décident pas à rejoindre leur lutte…

L’auteur : Né à en Gironde en 1970, Sébastien Gendron est réalisateur de courts métrages, de produits pour la télévision, et travaille aussi pour la communication audiovisuelle des entreprises.
Il est également l’auteur de quelques livres à petits tirages. Son premier roman, La jeune fille et le cachalot (publié aux éditions CyLibris), est un polar qui se déroule au pied du Sacré-Cœur. En 2008, paraît le recueil de nouvelles Échantillons gratuits ne pouvant être vendus séparément, aux éditions Les petits matins. Sébastien Gendron est l’auteur d’une quinzaine de romans noirs. Il est aussi scénariste et chroniqueur. Il a notamment publié Road Tripes (2013), La revalorisation des déchets (2015) aux Éditions Albin Michel, et Fin de siècle (2020) dans la Série Noire, aux Éditions Gallimard. Il écrit également pour la jeunesse et écrit des feuilletons littéraires.
Après une quinzaine d’années passées à Paris, il vit aujourd’hui à Bordeaux

Extraits : 
« Au milieu de ce bureau de parpaings, avec deux cadavres à ses pieds, un couple est enlacé pour une sorte de quart d’heure américain figé et sans musique. Quelque chose d’infiniment déséquilibré, mais terriblement beau, comme toutes ces images symboliques qui font les grandes heures de l’histoire humaine : ce Chinois face aux tanks de la place Tiananmen ; cette hippie de Washington qui se tient, une marguerite à la main, face aux baïonnettes des gardes mobiles ; ce pompier qui donne de l’oxygène à un chaton – bref, toutes ces collections d’images qu’on regarde sur Internet quand on n’a rien d’autre à foutre que passer son temps derrière un écran à chercher un sens à la vie sur Terre. »
 
« Les Tarzan avec Johnny Weissmuller, Clément les avait tous vus. Et ce soir-là, ils repassaient Les Aventures de Tarzan à New York – celui dans lequel l’homme-singe saute du haut du pont de Brooklyn parce que la police lui court après pour lui faire la peau. Clément ne l’aurait manqué pour rien au monde. Même avec cette migraine qui lui avait fait rendre tout son quatre-heures, là, sur la table du salon, et qui avait à peine diminué après un sachet de Catalgine et trois heures passées à gémir au fond de son lit.
À 20 h 45, il n’avait pas résisté à l’appel du Cinéma du dimanche soir et son générique disco. Fébrile, il s’était levé et, comme à son habitude, il s’était allongé sur le sol du couloir et s’était mis à ramper. Il avait ouvert la porte du salon, tout doucement, et il avait repris son déplacement stratégique jusqu’au canapé. Là, les mains glissées sous le menton, Clément avait retrouvé son héros, avec son slip en suédine, sautant de liane en liane en poussant son cri de dingue, Cheeta sur les talons. Une forme de bonheur absolu qu’il avait tenté de vivre le plus longtemps possible alors que le sang s’était remis à battre contre ses tempes et que la bile glissait entre ses molaires à intervalles réguliers. Et puis il y avait eu une sorte de coup de canon qui ne venait pas du film. »

 

La chronique jubilatoire de Dany

Révolution, Sébastien Gendron

Lorsque j’ai rencontré Sébastien Gendron en salon à Lisle noir, je lui ai avoué ne jamais l’avoir lu. Sans animosité aucune , il m’a alors conseillé de commencer par Révolution. Voici donc mon premier Gendron !

Tout est très visuel chez lui : des losers à la Tarantino, un coup de foudre digne de la rencontre de Maria et Tony dans West Side Story puis la catastrophe !

Pandora et Georges, victimes d’une agence d’intérim douteuse, décident d’unir leurs destinées pour un projet extrême ou plutôt Georges, amoureux est prêt à suivre Pandora dans son délire : une prise d’otages. Sur l’autoroute coupée du monde, une micro-société de vacanciers va ainsi avoir des réactions inattendues ou pas. Cette situation hors du commun est parallèlement relayée par une radio et son programmateur féru de rock, ce qui fera que le lecteur aura à la fois les images et le son !

L’autopsie de cette prise d’otages avec les factions antagonistes qui émergent permet à l’auteur de s’en donner à cœur joie dans la critique de notre société, avec une jubilation non dissimulée. Il égratigne tout ce qui passe !

Pandora est tout de même une sacrée nana, quand on sait que l’auteur avait en tête une adaptation à l’image dont le rôle aurait été tenu par Vanessa Paradis, on se dit que son écriture toute suggestive qu’elle est, est diablement efficace ! Moi j’y voyais Uma Thurman dans Kill Bill. La fin, parce qu’il en faut bien une, est une pirouette mais comment en aurait-il pu être autrement, en présence d’un tel délire !!

Lecteurs vous n’oublierez pas les scènes cocasses qui jalonnent ce roman ni les plaidoyers pour échapper à la surconsommation notamment. Votre empathie va être mise à rude épreuve et Sébastien Gendron va vous pousser à réfléchir même s’il se défend de passer un message, son écriture n’est pas un acte gratuit !

J’ai adoré cette loufoquerie méditative …

Lu en version numérique 7.99 €

Autres extraits :
« Émilie vient de fondre en larmes comme elle le fait systématiquement quand une situation dépasse son entendement – crevaison, bourrage du filtre de la machine à laver, plantage de la LiveBox au moment de regarder Faites entrer l’accusé… Alors Jean Le Floch réagit. Il ouvre la boîte à gants sous le levier de vitesse, tripatouille dans le monticule d’objets inutiles qui emplissent le réceptacle, puis, au toucher, finit par identifier l’antique Sagem qu’il faut recharger toutes les quatre heures pour espérer avoir dix minutes d’autonomie. La main tremblante, il compose le numéro de la police et plaque l’appareil contre son oreille.
– Orange vous informe que le numéro que vous demandez n’est pas attribué… »
« Au kilomètre 152, dans un Combi Volkswagen vintage :
– Écoute, papa, tu sais quoi ? Tu me casses les couilles avec Mai 68, ok ? Parce que t’étais peut-être sur les barricades avec tous tes potes de Nanterre, t’as peut-être tout pété à la Sorbonne, t’as peut-être mis sur la gueule aux CRS et aux mecs d’Assas, mais en attendant, vous êtes devenus quoi ? Parmi les mecs avec qui tu gueulais « L’imagination au pouvoir » et « Je ne veux pas perdre ma vie à la gagner », y a quand même une belle brochette d’enculés qui l’ont pris, le pouvoir, qui sont pas près de le lâcher et qui crachent sur « La jeunesse est dans la rue ». En 68, papa, vous aviez le plein emploi et vous nous avez laissé que dalle à part la pilule et le soi-disant amour libre. Vous vous êtes bien engraissés, vous avez baisé dans tous les coins et nous, on s’est retrouvés avec le chômage et le sida. Alors, s’il te plaît, arrête de dire que cette nana est rien qu’une connasse de bourgeoise qui déraille, merde ! »

2 réflexions sur “Révolution, Sébastien Gendron

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