La GAV : Céline Denjean sous le feu des flingueuses seconde audition. 2/4

La GAV : Céline Denjean sous le feu des flingueuses, seconde audition. 2/4

Suite de la Garde à vue de Madame

@Thibault Sipal

Céline Denjean

2e interrogatoire par Aline Gorzack

La GAV, Garde à vue d’un auteur par Collectif polar c’est : 4 interviews d’un même auteur par 4 flingueuses différentes.

La GAV c’est des interviews en direct, du vrai live, en conditions réelles.


Miss Aline : Allez c’est parti…. Que la prévenue se présente….

Céline Denjean : de nouveau parmi vous

Miss Aline : voyons le côté « technique » du travail d’auteure…. Pour commencer à quoi ressemble une séance d’écriture chez Céline : au calme ou pas, nombre de mots/chapitre, écriture au quotidien ou au feeling ?

Céline : je travaille toujours dans le calme absolu, ni musique, ni agitation. Je ne sais absolument pas combien j’ai de mots par chapitre !!!!!
7 pages écran font la moyenne d’un chapitre ? mais ça peut faire plus, parfois moins, ça dépend de ce que j’ai à raconter. Généralement, écriture au quotidien… sauf pendant les périodes de déplacements et salons, il faut jongler

Miss Aline : justement d’où vous viennent ces choses à raconter : anecdotes, faits divers, l’envie de parler un sujet en particulier … ?

Céline : écrivant du noir, je regarde autour de moi. Il y a tellement de choses qui glacent les sangs : les sujets ne manquent pas. On n’aurait pas assez de dix vies pour les aborder

Miss Aline : un auteur est donc le reflet, le relais de son époque ?

Céline : pas que de son époque, non. Il est le relai de l’humanité, de son histoire, de son devenir, pourquoi pas !

Miss Aline : mais encore… vous pouvez développer ?

Céline : bref, le cœur du noir c’est l’homme

Miss Aline : l’homme serait-il fondamentalement mauvais ?

Céline : tout ce que nous vivons ne relève que de l’homme : le système économique, politique, les relations entre individus, les questions de genre, les problèmes de tolérance, de violences, de transgressions, les modèles sociaux. Je n’ai jamais dit que l’homme était mauvais !
Jamais !
Il n’est pas seulement bon. Il fait du mal. Il se différencie du monde animal par sa capacité à élaborer le mal, à contourner un ordre, à transgresser un interdit. Autant de notions propres à l’homme, en cela il est fascinant, flippant et fait le sujet de livres noirs

Miss Aline : pourquoi cette fascination pour le noir donc …par le côté mauvais de l’individu ?

Céline : Je ne sais pas … Question de quotient émotionnel surement, d’empathie

Miss Aline : le lecteur chercherait à expliquer, s’expliquer le mauvais côté de l’individu ? la compréhension ?

Céline : le besoin de comprendre fait partie de l’homme, si rien n’a de sens, tout est permis, si tout est permis, alors…
Bref, oui, je crois que le lecteur cherche à mieux cerner son reflet (moral, sociétal, économique…) au travers des livres

Miss Aline : sur quel thème aimeriez-vous écrire mais sur lequel vous n’osez franchir le pas et pourquoi ?

Céline : si j’ai vraiment envie d’écrire sur un thème, je le fais. C’est surtout la question du prisme qui va se poser : par quel prisme vais-je aborder tel ou tel sujet ?
Mais, en soi, il n’y a pas vraiment de barrière au sujet traité : je ne suis pas certaine par exemple de développer des pages et des pages de tortures ; je vais plutôt choisir de suggérer…C’est donc l’angle du récit qui compte pour moi quand un sujet le nécessite (à mes yeux)

Miss Aline : ce qui peut être parfois délicat.

Céline : quoi donc ?

Miss Aline : l’angle d’approche

Céline : de choisir l’angle du récit ?

Miss Aline : oui

Céline : oui et non…
C’est délicat si on commence à se demander ce que les lecteurs sont censés vouloir. Je pense qu’on doit choisir une justesse de ton à nos yeux propres.
Si on choisit un angle en fonction du lecteur, on n’est plus libre

Miss Aline : je suis d’accord

Céline : si on n’est plus libre, on perd en puissance. Si on perd en puissance, on fait de la soupe !

Miss Aline : et pourtant le lecteur est important… vous en rencontrez souvent…. Que prenez-vous (ou pas) de leur remarques, commentaires, observations ?

Céline : le lecteur est important mais rester fidèle à ce que l’on est l’est tout autant

Miss Aline : je n’en disconviens pas.

Céline : je prends toutes sortes de remarques me paraissant pertinentes même si l’esprit est un peu hard parfois. Si quelqu’un dit quelque chose et que ça me fait tilt, je prends, quel que soit son intention (me blesser, m’aider…) peu importe, si ça fait tilt, je prends ! Si ça ne fait pas tilt, je laisse

Miss Aline : vous est-il arrivé, après parution, de vous dire « ah zut, j’aurai pu faire ça ou ça… » ou au contraire vous êtes toujours pleinement satisfaite de votre texte ?

Céline : je ne suis jamais satisfaite de mes textes. Je sais qu’on peut toujours améliorer et j’ai suffisamment de recul maintenant pour savoir que, pas une fois, je n’ai relu un de mes ouvrages en levant les yeux au ciel à un moment ou à un autre. Le chef d’œuvre absolu, on court après mais il est un mirage

Miss Aline : combien de temps pour écrire un roman ? Quelle est la part de recherche ?

Céline : il me faut une année, entre l’idée, l’écriture, les recherches. Tous les sujets ne demandent pas le même temps de recherche, mais globalement, la recherche prend beaucoup de temps … difficile d’évaluer. Parfois pour 3 lignes dans le livre, on va lire des kilos de doc !!! Je dirais un bon tiers du temps de recherche.

Miss Aline : vous vivez pendant douze mois avec vos personnages, leur arrivent-ils de prendre le « contrôle » ?

Céline : je vis dans mon histoire, oui… les questions sont plutôt fréquentes quand je bloque ou que je u face à une hésitation par rapport au développement ou l’issue d’une scène. Heureusement qu’aucun de mes personnages de fiction ne prend le contrôle de ma vie !!! sinon je serais bonne pour l’asile !!!

Miss Aline : est-il parfois difficile de vous en séparer ?

Céline : non. Ils s’invitent de temps en temps, face à une situation concrète. Mais c’est plus un clin d’œil que je me fais à moi-même. Et puis beaucoup de mes personnages sont glaçants… donc bon, qu’ils restent là où ils sont, ça me va très bien !

Miss Aline : d’où vous viennent vos personnages ? De votre entourage ?

Céline : heureusement que je ne suis pas entourée dans la vraie vie de personnes ressemblant à mes personnages ! Non… je m’intéresse avant tout à la psychologie du criminel. Donc, je dois absolument dans ma tête « m’approprier la psychologie des personnages. Je dois les « comprendre »

Miss Aline : vaste sujet que la psychologie du criminel.

Céline : savoir comment ils se justifient, comment ils raisonnent, comment ils ressentent, comment ils s’expriment, ce qu’ils poursuivent, ce qui les fait tenir debout, où sont leurs faiblesses.

Miss Aline : où puisez-vous vos sources pour répondre à ces « comment » etc ?

Céline : bref, je les invente à partir de données cliniques : si je campe un personnage psychotique, je dois savoir ce qu’est une psychose. Si je campe un politicien véreux, je dois savoir comment il se positionne, s’il aime ou non ses enfants, s’il trompe sa femme… s’il préfère les linguines aux fruits de mer ou une viande au barbecue, et pourquoi !

Miss Aline : même traitement de faveur pour les personnages secondaires ?

Céline : oui, il y aura un peu moins de profondeur… mais il faut que leur profondeur soit proportionnelle à leur présence dans le livre. Même la voisine qui ne prendra qu’une scène, je dois me la représenter !
Finalement, j’ai très peu de personnages « secondaires »

Miss Aline : comment choisissez-vous les lieux des intrigues ?

Céline : Je choisis des lieux qui constituent un berceau émotionnel. J’ai besoin de sentir l’atmosphère d’un lieu pour la restituer. Parfois, de simples images peuvent suffire à me « téléporter ». Je ne suis pas allée en Inde quand j’ai écrit la fille de Kali, par exemple !

Miss Aline : que représente l’écriture pour vous ? votre quintessence ? un besoin ?

Céline : j’ai besoin d’écrire, c’est en moi, difficile à expliquer. Je me suis toujours raconté des histoires, aussi loin que je puisse remonter, et le fait d’écrire pacifie ma relation au réel.

Miss Aline : C’est à dire ?

Céline : ça donne du sens à mon existence, donc ça crée une certaine paix

Miss Aline : d’accord.
Sur ce je vais vous libérer de cet interrogatoire sauf si vous avez quelque chose à ajouter.

Céline : euh, je vous remercie de l’intérêt que vous m’avez porté !!!
J’espère avoir répondu à vos attentes !

Miss Aline : c’est moi qui vous remercie et oui c’était très instructif.
RDV demain 9h avec Danièle.

Céline : alors, bonne fin de journée…et à demain pour un nouveau moment de GAV !!!

Fanny : Bon aprèm à toutes. A demain

Miss Aline : bonne fin de journée également….

Dany : Prends donc des forces Céline, je confirme demain RDV à 9 h 

Ge : Demain effectivement nous retrouverons Madame Céline Dejean en compagnie de deux autres flingueuses en la personne de Fanny H et Mamie Danièle.

Allez cette fois c’est …

La Fin de la seconde audition 

 

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