Le meurtre de Harriet Monckton, Elizabeth Haynes

Le livre : Le meurtre de Harriet Monckton de Elizabeth Haynes. Traduit de l’anglais par François Hoff, Clara Lupfer, Pierre Marchant et Martin Petrowsky. Paru le 13 mai 2022 chez Beau Jardin dans la collection Mauvaise Graine. 22€. (560 p.) ; 21 x 14 cm

4e de couv

Le 7 novembre 1843, Harriet Monckton, 23 ans, est retrouvée assassinée par ingestion d’une dose mortelle d’acide prussique derrière la chapelle qu’elle fréquente régulièrement à Bromley, dans le Kent. Le chirurgien rapporte que Harriet était enceinte d’environ six mois.
En s’appuyant sur les rapports du coroner et les dépositions des témoins, Elizabeth Haynes reconstitue les dernières heures d’Harriet à travers les yeux de ses proches et des dernières personnes à l’avoir côtoyée. Ses collègues professeurs, son futur fiancé, son séducteur, son ancien amant – tous sont suspects ; chacun a une raison de vouloir sa mort.
Histoire de luxure, de manipulation et de culpabilité, Le meurtre de Harriet Monckton est une leçon de suspense. Mais c’est aussi et peut-être surtout une histoire vraie, un cold case, triste témoin de la condition d’une jeune femme dans une société hypocrite et dévorante, à laquelle Elisabeth Haynes apporte une solution brillante et surprenante.
L’auteur : Elizabeth Haynes est une ancienne analyste du renseignement de Scotland Yard. Son premier roman, Into the Darkest Corner, a été best-seller du New York Times, publié dans 37 pays. Autrice de thrillers psychologiques, traduits en France par les Presses de la Cité (Comme ton ombre) elle signe ici un polar victorien d’une grande actualité.

Extraits : 
«Quand la Mort nous rend visite, elle revêt le plus inattendu des déguisements.
Harriet Monckton n’a pas eu le temps de penser à cela, ni de réfléchir à quelque chose d’aussi profond que la vie et la mort. Elle n’a même pas, à la fin, eu le temps de dire ses prières, de demander de l’aide ou de confesser ses péchés.
Mais au moins, elle n’était pas seule. Un tel privilège n’est pas accordé à tous ; peut-être était-ce une manifestation de miséricorde.
Elle ne la méritait pas, cette pitié, en réalité. Debout, le dos droit, fière, un petit froncement de sourcils comme si elle avait été interrompue dans ses prières, plutôt que l’acte bien plus profane auquel elle se livrait. L’air même autour d’elle était sale, contaminé. Il puait le péché.
Elle avait échangé quelques mots, à voix basse, bien qu’aussi tard et dans ce lieu il n’y eût personne pour l’entendre. Quelqu’un aurait pu, peut-être, rentrer à pied, le long de la route, à une trentaine de mètres, mais, ici, leur isolement était total.
Il y a autre chose que je pourrais faire pour vous aider.
Elle avait dit :
— Je pensais que nous étions d’accord…
Vous n’êtes pas la première fille à avoir des ennuis, vous savez. C’est évident pour quiconque a un œil et la moitié d’un cerveau. Regardez-vous.
Et en effet, elle s’était regardée. Les robes peuvent cacher bien des choses, mais il arrive un moment où le gonflement du ventre d’une fille soulève le bas de ses jupes et toute sa silhouette semble étrange. Tout sonne faux.
— Si j’avais juste assez d’argent, avait-elle dit, alors je pourrais partir et ne plus déranger personne…
Ceci est une meilleure solution. Ça résout complètement le problème. Vous le voulez, oui ou non ?
— Qu’est-ce que c’est ?
Une gorgée. Cela vous aidera à redevenir comme avant ; l’effet est très rapide.»
«— Ce serait sûrement un péché terrible, avait-elle dit.
Mais déjà elle hésitait.
On le lisait sur son visage. Le rejet, suivi du doute. Aucun des plans qu’elle avait envisagés n’était infaillible. Les choses peuvent toujours mal tourner. Et combien il serait plus facile de faire table rase, de recommencer. Elle agirait différemment, bien sûr. Et sa vie pourrait glisser dans ses anciens rails. Elle serait respectable, totalement. Elle pourrait aller à Arundel, comme elle l’avait prévu, avant que son problème ne se manifeste. Elle pouvait encore – même si elle vieillissait – trouver un bon parti.
Toutes ces pensées agitaient son visage.
— Est-ce que ça va faire mal ? avait-elle demandé, et la Mort s’était frotté les mains avec joie, sachant qu’elle lui appartenait presque.
Un peu, peut-être. Pas bien pire que ce que vous endurez chaque mois. Ce sera rapide.
Ce n’était pas un mensonge, pas vraiment. Au moins cette souffrance-là prendrait vite fin, et elle redeviendrait, effectivement, ce qu’elle avait été, bien que ce soit dans l’état d’avant sa naissance. Au néant.»

Le post-it de Ge

Le meurtre de Harriet Monckton, Elizabeth Haynes

 

Elizabeth Haynes nous entraine dans polar historique qui a tout d’un True Crime. Un cold case victorien glaçant tirer des archives de Scotland Yard.

Mais alors que nous raconte « Le meurtre de Harriet Monckton » : Harriet Monckton, 23 ans, est retrouvée assassinée le 7 novembre 1843 derrière la chapelle qu’elle fréquentait à Bromley, dans le Kent. Le chirurgien détermine qu’elle était enceinte de six mois quand elle a été empoisonnée à l’acide prussique. A travers les récits de ses proches, l’auteure tente de résoudre à cette affaire classée depuis plus de 150 ans.

« Le monde oublierait Harriet Monckton, et dans quelques années même sa famille cesserait de parler d’elle. » C’était sans compter sur Elizabeth Haynes qui redonne vie ici à cette jeune femme. Durant toutes les premières grandes parties du roman nous allons la découvrir. Harriet Monckton est une jeune femme courageuse, curieuse, trop peut-être pour l’époque. C’est aussi une femme dynamique, elle détonne dans son village, elle est intelligente, trop peut-être là aussi dans une société anglaise trop étriqué pour qu’une fille de la campagne trouve sa place dans la bonne société victorienne.

Nous sommes en novembre 1843, et on va suivre quelques protagonistes qui ont tous un rapport avec notre pauvre Héroïne, Frances Williams, le Révérend George Verrall, Thomas Churcher. Tous vont à tour de rôle nous raconter Hariett. A travers leur regard on va découvrir Miss Monckton, on découvrira son petit monde, les personnes qui peuplaient son univers, sa sœur, sa mère, son employeur, ses collègues, son amoureux et les autres aussi…

Nous sommes là dans un roman choral. Tous ses voix nous montrent un aspect différent de notre pauvre héroïne. Elles nous permettent de mieux appréhender sa personnalité, ses attentes, ses rêves et ses ambitions. Tour à tour nous découvrons une part de vérité. Car on le sait chacun à la sienne, nulle vérité n’est entière. On pense aussi savoir qui est le coupable du meurtre d’Harriet Monckton et puis l’instant d’après on doute et si la vérité n’était pas aussi simple ?

Et puis d’un coup nous sommes en 1949, trois ans après la mort d’Harriet, celle que l’on a dit suicidée. Un suicide qui arrangeait bien tout le monde, il faut bien le dire. Et oui une jeune femme célibataire que l’on retrouve morte dans une chapelle et qui portait une enfant. Normal qu’elle n’est pas voulu vivre avec toute cette culpabilité sur les épaules, normal, le péché était trop lourd. Mais pourquoi ne s’interroge donc pas sur l’identité du père. Harriet était bien trop indépendante, bien trop émancipée pour une femme du milieu du 19e siècle, elle méritait sans doute ce qui lui était arrivé.  Mais voilà, le suicide n’en est pas un, est Harriet a bel et bien était assassinée.

Assassinée notre jeune femme ? Oui mais par qui et pourquoi ?

Le pourquoi est plutôt évident à comprendre. Pour sauver l’honneur d’un homme, d’une famille, de la bonne société … Les causes ne manquent pas !!!

Oui mais tout n’est là aussi pas aussi simple qu’il n’y semble.  Et de retournements de situations en témoignages qui diffèrent, notre autrice construit une intrigue habile qui nous déstabilise.

De plus, il est agréable de revivre au cœur cette époque victorienne, ce 19e siècle anglaise marquée par l’apogée de la révolution industrielle britannique et celle de son immense Empire. Cette époque où la puissance et la richesse de la nation britannique contracte fortement avec la misère sociale qui prédomine dans le pays.

Elisabeth Haynes est aussi la digne héritière Emily et Charlotte, les sœurs Brontë mais aussi de la grande dame Agatha Christie.

A travers ce fait divers oublié, Elizabeth Hayne donne la parole au femme d’autrefois mais aussi à celle d’aujourd’hui.

Un fait divers oublié qui résonne comme un fait divers actuel !

Un joli tour de force aussi. Il n’y a qu’un pas que j’ose franchir pour dire que ce briant polar historique est un polar noir et engagé  !

Le meurtre de Harriet Monckton ou la revanche des femmes… Un nouveau cri d’alarme contre les violences faites au femmes et pour dénoncer les féminicides.

 

« — Désolée de vous déranger, monsieur, dit-elle en refusant le siège. Je cherche ma sœur.
— Harriet ?
Après coup, je me dis que c’était une erreur de prononcer ce nom. Mary Ann avait trois sœurs ; que je connaisse Harriet plus intimement qu’aucune autre était un détail qui ne devait être révélé en aucune circonstance, encore moins à ce moment-là. »

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2021 au 11 Juillet 2022) ;  

Le Challenge « Le tour du monde en 80 livres » chez Bidb (Royaume-Unis).

et le challenge Les dames en noir chez Zofia

6 réflexions sur “Le meurtre de Harriet Monckton, Elizabeth Haynes

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