Et nous sommes revenus seuls de Lili Keller-Rosenberg

Le jour décalé sur Collectif Polar

Et nous sommes revenus seuls de Lili Keller-Rosenberg, avec la participation de Virginie Carton, paru le 8 avril 2021 aux éditions Plon ; 15€ .(156 p.) ; illustrations en noir et blanc ; 19 x 12 cm. Rééditer en poche  le 14 avril 2022 chez Pocket. 6€50. (137 p.) ; illustrations en noir et blanc ; 18 x 11 cm

4ème de couverture

« Pendant des années, nous ne parlons pas à la maison de nos nombreux mois de déportation, d’inhumanité dans les camps. Nous avons le sentiment que nous ne pouvons raconter à personne cet enfer, ces souffrances quotidiennes, cette vie de bêtes battues que nous avons menée pendant près de deux ans. Nous sommes traumatisés. Les rares fois où nous essayons de l’évoquer, on ne nous croit pas. N’être pas crus nous blesse terriblement. Longtemps, nous nous sommes tus.
J’ai eu envie de rompre le silence à un moment très précis, encore vif dans ma mémoire.
Un jour, j’ai entendu à la radio quelqu’un dire que les chambres à gaz n’avaient existé que pour tuer les poux. Ces mots ont été si douloureux, si pénibles à entendre que j’ai décidé, ce jour-là, de réagir.
J’ai réfléchi à la façon dont je pouvais m’adresser à ces gens-là. La réponse qui m’est venue, c’est qu’il fallait éduquer les jeunes, les informer, les éclairer. Il me fallait témoigner pour révéler à tous, au monde, aux jeunes générations, cette tragédie à nulle autre pareille, afin qu’elle ne se reproduise plus jamais. »

L’auteure :  Lili Leignel, née Rosenberg-Keller, 89 ans, vit à Lille.Elle est une conférencière, survivante et témoin de la Shoah. Elle est née dans une famille juive d’origine hongroise. Fille de Joseph Rosenberg et Charlotte Keller, la famille est composée de trois enfants. Jusqu’en 1943, les enfants sont cachés dans différentes familles de Tourcoing. Pensant le danger écarté, ils reviennent vivre avec leurs parents. Le 27 octobre 1943, la famille est arrêtée.
De la prison de Loos à Lille, ils sont conduits à la Prison de Saint-Gilles de Bruxelles et transférés au Camp de rassemblement de Malines, en Belgique.
La famille y est séparée : le père est envoyé à Buchenwald, la mère et ses trois enfants sont transférés à Ravensbrück et au début de 1945, à Bergen-Belsen.
Libérés par l’armée britannique, le 15 avril 1945, les trois enfants sont rapatriés jusqu’à Paris où ils sont pris en charge par leur tante.
Leur mère, atteinte du typhus, intransportable, reste à l’infirmerie du camp. Elle parvient à les rejoindre plus tard dans un préventorium d’Hendaye (Pyrénées-Atlantiques) où ils sont soignés. Ils apprendront que leur père a été fusillé en avril 1945 à Buchenwald, quelques jours avant la libération du camp.
Après la guerre, Lili Leignel consacre sa vie à témoigner auprès de collégiens et de lycéens dans toute la France. Un collège porte son nom à Halluin (Nord).Elle consacre sa vie à témoigner auprès de collégiens et de lycéens dans toute la France. Un collège porte son nom à Halluin (Nord).
Virginie Carton est née 12/04/1972. Elle vit Lille. Elle a écrit 4 romans Des amours dérisoires, Grasset 2012 ; La blancheur qu’on croyait éternelle, Stock 2014 ; La veillée , Stock 2016 et Restons bons amants, Viviane Hamy 2022.
Extrait
 « Je suis juive, et je ne sais pas vraiment ce que cela signifie. Mes parents ne sont pas pratiquants. À la maison, il n’est pas question de religion, uniquement d’amour, d’honnêteté, de valeur du travail. À l’école, les jeux innocents occupent nos récrés, et l’on nous y distribue des biscuits vitaminés rectangulaires et du lait. C’est le moment préféré de notre journée et nous l’attendons avec grande impatience ! J’apprécie mes camarades, elles m’apprécient aussi. Je vais à l’école le cœur léger.
En classe, je me suis fait une copine, elle s’appelle Nicole. Elle est brune, gentille, pas vraiment exubérante, mais je l’aime bien. Sa maman est enseignante. Nous jouons souvent à la marelle dans la cour. Le soir, Nicole et moi faisons la route ensemble, en empruntant le pont Saint-Vincent »

« Le camp est en surnombre. Lorsque nous entrons dans le block qu’on nous a désigné, qui ressemble plus à un baraquement, il fait sombre, nous ne voyons pas très bien, mais nous devinons qu’il est plein à craquer. Immédiatement, un groupe de Polonaises se ruent sur nous. Menaçantes, elles se mettent à nous battre, nous maltraitent en hurlant sur nous. Elles nous reprochent de ne pas être morts. 《 Il n’y a déjà plus de place et pas assez de rutabagas pour nous ! 》, vocifèrent-elles. Les femmes gémissent, les enfants pleurent. Notre installation se fait dans le chaos. Nous nous asseyons par terre, et ne bougeons plus, serrés dans un recoin étroit. Robert et moi nous couchons à moitié sur une personne qui nous laisse faire, ne nous fait aucune remarque désobligeante. À la clarté du jour naissant, nous découvrons que nous avons dormi sur un cadavre. »

 

Les missives de Fanny H

Et nous sommes revenus seuls de Lili Keller-Rosenberg

Malgré la guerre depuis trois ans et les changements liés à celle-ci, comme le fait de porter une étoile jaune sur ses vêtements, Lili Rosenberg, dix ans, est heureuse. Elle vit entourée de l’amour de sa maman Charlotte, couturière, de son père Joseph, employé, ses deux frères, Robert et André, presque neuf et deux ans.
Une vie insouciante, du moins pour ces enfants, qui vole en éclats lorsque le 27 octobre 1943 à trois heures du matin, font irruption chez eux des soldats allemands.
Ce qui suivra ne sera que l’escalade de l’horreur portant le nom de Shoah.

La Shoah signifie « la catastrophe » en hébreu. Ce terme désigne spécifiquement la mise à mort de près de 6 millions de Juifs d’Europe par l’Allemagne nazie et ses collaborateurs pendant la période de la Seconde Guerre mondiale. Le terme Holocauste, plus couramment utilisé dans les pays anglo-saxons pour désigner ce génocide, signifie en grec « le sacrifice par le feu ». (Source http://www.memorialdelashoah.org/).

Le jeudi 22 avril 2021, je me suis rendue à la dédicace de la librairie Le Marais du livre à Hazebrouck (59) et surtout à la rencontre de Lili Leignel.  Ce jour-là, il y avait beaucoup de monde et je n’ai pu passer le temps que j’aurai souhaité avec l’auteure.

Et nous sommes revenus seuls ne se lit pas quelques instants pour se détendre, ne se pose pas sur une table en se disant je vais le reprendre tout à l’heure lorsque j’aurai un petit moment. C’est une lecture extrêmement forte, une lecture pour apprendre, une lecture pour comprendre et transmettre autour de soi et dire oui cela a existé !

Transportés de camions en prisons, de maltraitances en humiliations, entassés dans des wagons à bestiaux vers les camps de la mort, ainsi est la souffrance et le traumatisme que vont subir cette enfant et sa famille. Ils seront rapidement séparés, le papa d’un côté, Lili, sa maman et ses frères de l’autre. Leur quotidien sera inhumain, innommable…
Et nous sommes revenus seuls est un récit bouleversant. Il l’est d’autant plus qu’il est raconté par une personne ayant vécu tout cela avec pour but ultime de témoigner. Vous trouverez quelques photos et des documents officiels.

Je savais qu’ouvrir les pages de ce livre serait douloureux. En faire la chronique également, mais nécessaire car la folie des hommes rôde toujours. Lili Leignel signe sa dédicace en nous nommant « messager » et en effet, à notre humble niveau, c’est bien ce que nous sommes afin de communiquer l’Histoire aux générations futures, c’est un devoir.

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